Le Mont Saint-Michel, 13 siècles entre légendes et spiritualité

Conception : Archives de la Manche

Archives départementales de la Manche

Souvent qualifié de merveille, preuve de son incontestable originalité architecturale, le Mont Saint-Michel est entouré dès sa création de plusieurs légendes. Il est aussi depuis l'Antiquité et jusqu'à nos jours un haut lieu de spiritualité et de pèlerinages.

Troisième apparition de saint Michel à saint Aubert en 708 (1865), Chanoine Emile-Aubert PigeonArchives de la Manche

Une fondation légendaire

Le plus ancien texte sur les origines du Mont Saint-Michel, la "Revelatio ecclesiae sancti Michaelis" (IXe siècle), nous enseigne la légendaire fondation du lieu. Au début du VIIIe siècle, saint Michel apparaît à trois reprises en songe à Aubert, évêque d’Avranches, pour lui demander de bâtir un sanctuaire. Excédé par les refus répétés du prélat, l’Archange lui aurait transpercé le crâne de son doigt. A la suite de ces apparitions, le prélat aurait aménagé le premier sanctuaire. La "Revelatio" raconte encore qu'après la fondation, Aubert envoie des messagers au Mont Gargan (Italie) afin d'établir des relations charitables entre les deux sanctuaires. Lorsqu'ils reviennent au Mont les messagers découvrent un oratoire achevé alors qu'ils avaient quitté un "un endroit rempli de broussailles". Cette phrase est peut-être à l'origine de la mythique forêt de Scissy. Une mauvaise traduction (XVe s.) aurait transformé les broussailles en une épaisse végétation emportée par un miraculeux raz-de-marée.

Le Mont à l'époque celtique, Emile-Aubert Pigeon, Provenant de la collection : Archives de la Manche
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Avant l'ère chrétienne, le Mont était probablement déjà un lieu de culte. D'après La revelatio, les populations environnantes le nomment alors le Mont Tombe.

Découverte des ossements de saint Aubert, Massieu, Bure, 1880, Source d'origine : Le site des Archives de la Manche
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Au début du XIe siècle, les moines découvrent les restes d'un squelette caché dans les combles d'une cellule de moines, restes miraculeusement identifiés comme ceux de saint Aubert.

Le crâne de saint Aubert, S. Yrondy et G. Mabire, Provenant de la collection : Archives de la Manche
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La relique du crâne de saint Aubert conservée à Avranches garderait toujours la trace de cette miraculeuse trépanation.

A View of Mont St. Michel, on the Coast of Normandy ; on descending the hill from Avranches (1804), J. ForbesArchives de la Manche

Au XVe siècle, l'historiographie établit une confusion entre le défrichement du Mont et la disparition de la forêt mythique de Scissy qui aurait été recouverte en 709 par un raz-de-marée.

Louis-Auguste Bosseboeuf, Le Mont Saint-Michel. Son histoire et ses merveilles (1910)Source d'origine : Le site des Archives de la Manche

Un lieu de légendes dédié à Saint Michel

Durant l'Antiquité et selon la tradition, le lieu est appelé le Mont Tombe par les populations environnantes. Il est certainement déjà un lieu de culte entouré de légendes. Avec la diffusion du christianisme, le Mont est dédié au culte de l'archange Saint Michel. Originaire d'Orient, ce culte se propage dans l'Empire Byzantin puis gagne l'Italie et le reste de l'Europe au Ve siècle. Les endroits élevés, comme le Monte Gargano dans les Pouilles, ou les grottes sont souvent choisis comme sanctuaires à Saint Michel.

Saint Michel terrassant le dragon, Chanoine Emile-Aubert Pigeon, Provenant de la collection : Archives de la Manche
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Selon l’Apocalypse de Jean, l’archange saint Michel est un combattant victorieux des anges rebelles emmenés par Satan et représenté sous la forme d’un dragon.

Saint Michel protecteur des âmes, Chanoine Emile Aubert Pigeon, Provenant de la collection : Archives de la Manche
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L’archange saint Michel est dit « psychopompe », un guide qui conduit les âmes vers Dieu.

Saint Michel peseur des âmes, Chanoine Emile Aubert Pigeon, Provenant de la collection : Archives de la Manche
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Il est également dit « psychostase » c'est-à-dire chargé de peser les âmes au moment du Jugement dernier. Il est alors l'ange du passage dans l'au-delà, représenté avec une balance.

Pèlerins arrivant au Mont Saint-Michel, conduits par un enfant, d’après un manuscrit du Mont Saint-Michel (XIVe siècle)Archives de la Manche

Les pèlerins du Mont

Les hommes et les femmes du Moyen Âge vivent dans un monde où le fait religieux est omniprésent. Tous les actes de la vie quotidienne trouvent un sens divin. Or, certains lieux comme le Mont Saint-Michel s'élevant vers le ciel, difficiles d'accès, préservés et donc associés à la pureté, conservant des reliques prestigieuses, constituent des endroits privilégiés, où solliciter les forces divines. Pour ces raisons, le Mont accueille ses premiers pèlerins peu de temps après sa fondation. La première trace d'un pèlerinage au Mont date de 868. Les textes citent un moine Bernard arrivé au Mont après un voyage au Mont Gargan (autre site michaelien situé en Italie), à Jérusalem et à Rome.

Dessin d'une enseigne médiévale en plomb de pèlerin, Edouard Corroyer, 1880, Provenant de la collection : Archives de la Manche
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La tradition de la vente de souvenirs au Mont Saint-Michel est héritée du commerce d'enseignes c'est-à-dire des petits objets religieux vendus aux pèlerins du Moyen Âge.

Enseigne de pèlerin représentant saint Michel, Edouard Corroyer, 1880, Provenant de la collection : Archives de la Manche
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Arrivée au Mont Saint-Michel d'un pélerinage d'enfants, Eugène Le Mouël, 1900, Provenant de la collection : Archives de la Manche
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Miracle de la Vierge au Mont Saint-Michel d’après une peinture en camaïeu des Miracles de Notre-Dame (XVe siècle) par DurinArchives de la Manche

Cette représentation du XVe siècle évoque le souvenir d'un célèbre miracle survenu au Mont Saint-Michel lors d'un pèlerinage.

En 1011, une femme enceinte, originaire de Lisieux, venue en pèlerinage au Mont, aurait été épargnée par la marée montante durant l'enfantement grâce à l'intervention de la Vierge.

Premier pèlerinage de saint Louis au Mont Saint-Michel, Massieu & Coste, 1880, Source d'origine : Le site des Archives de la Manche
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Au Moyen Âge et au début de la période moderne, nombreux sont les rois de France à y faire un pèlerinage, Saint Louis, Philippe le Bel, Louis XI et enfin François Ier.

Statuts de l'ordre de Saint-Michel, 1469 (1725)Source d'origine : Archives de la Manche

A partir de la guerre de Cent Ans et la résistance du Mont face aux Anglais, Saint Michel devient le protecteur de la France. Il serait apparu à Jeanne d'Arc pour l'encourager à délivrer le royaume.

Abbaye du Mont Saint-Michel vers 1706, Monasticon gallicanum, 1706, Provenant de la collection : Archives de la Manche
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Aux XVIIe et XVIIIe siècles, les archives conservent la trace de pèlerinages venus, chaque année, de toutes les provinces du royaume.

Le Mont Saint-Michel, les arcades du cloître (1891/1899), Henri MagronArchives de la Manche

Déclin et renouveau spirituel (XIXe-XXe siècles)

Avec la Révolution française, les moines sont expulsés et l'abbaye est transformée en prison. Il faut attendre 1863 et la fermeture de cette dernière pour qu'une nouvelle communauté religieuse vienne s'y installer et que les pèlerinages reprennent. En 1867, 6 missionnaires de la congrégation des pères de Saint-Edme de Pontigny s'y installent et, le 3 juillet 1877, le couronnement de la statue de saint Michel est l'occasion d'une grande cérémonie à laquelle 25 000 pèlerins assistent.

Portrait de Monseigneur Jean-Pierre Bravard, évêque de Coutances et d'Avranches (1862-1875), 1862/1875, Provenant de la collection : Archives de la Manche
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A la fermeture de la prison, en 1863, Monseigneur Jean-Pierre Bravard saisit l'occasion pour restituer à l'abbaye son caractère religieux et spirituel.

"A ses pieds, j'ai prié pour vous", image de piété, 1880/1914, Source d'origine : Le site des Archives de la Manche
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A la fin du XIXe siècle, comme pour effacer le traumatisme de la défaite de 1870, l'église encourage le renouveau du culte à l'archange saint Michel, protecteur et défenseur de la France.

Image de piété, 1880/1914, Provenant de la collection : Archives de la Manche
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Image de piété, 1880/1914, Provenant de la collection : Archives de la Manche
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Programme des fêtes du XIIe centenaire du Mont Saint-Michel (1909)Archives de la Manche

Les fêtes du douzième centenaire du Mont Saint-Michel, qui se déroulent du 29 septembre 1908 au 16 octobre 1909, sont spectaculaires et attirent des dizaines de milliers de pèlerins.

Procession à l'occasion du XIIe centenaire (1909)Archives de la Manche

Our first view of the Sea, on retourning to England, after our captivity ; including the ruined Castle and Telegraph at Avranches, (1804-07), J. ForbesArchives de la Manche

L'engouement populaire pour les légendes montoises

A partir du XIXe siècle, les romantiques sont inspirés par les légendes et les mythes qui entourent le Mont Saint-Michel. Le monument suscite l'intérêt de ses auteurs ou artistes qui redécouvrent le Moyen Âge. Dès 1836, Victor Hugo décrit son architecture pour laquelle "il faudrait entasser les superlatifs d'admiration comme les hommes ont entassé les édifices sur les rochers". Dans La légende du Mont Saint-Michel (1883), Maupassant écrit : "Je l'avais vu [...] ce château de fées planté dans la mer [...] comme un manoir fantastique, stupéfiante comme un palais de rêve". Au XXe siècle, avec le développement touristique, les mystères du monument rencontrent les faveurs de la culture populaire comme en attestent les nombreux romans qui le prennent comme décor. 

Paul Féval, Les merveilles du Mont Saint-Michel, 1879, Provenant de la collection : Archives de la Manche
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Les ouvrages de Paul Féval, La fée des grèves (1850) et Les Merveilles du Mont Saint-Michel (1879), sont deux parfaits exemples de l'engouement populaire pour les mythes montois.

Les merveilles du Mont, Paul Féval, 1928, Provenant de la collection : Archives de la Manche
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Les grèves du Mont Saint-Michel (1850/1890), C. BoulangerArchives de la Manche

Le mythe de l'enlisé est certainement celui qui rencontre le plus de succès à l'époque contemporaine. Il inspire ainsi un roman de Jean-Joseph Renaud (1907) et le premier film tourné au Mont (1909).

Un enlisement dans les grèves (1900)Archives de la Manche

Dans un passage célèbre des Misérables, Victor Hugo raconte l'agonie de cet homme "dont le sable atteint [...] la poitrine", "élève les mains [...]" et "crispe ses ongles sur la grève".

Millénaire monastique du Mont Saint-Michel (1969)Archives de la Manche

Une communauté bénédictine s'installe à nouveau à l'abbaye en 1966. En 2001, les Fraternités monastiques de Jérusalem leur succèdent.

Crédits : histoire

Une exposition présentée par le Conseil départemental de la Manche (direction des archives départementales)


Documentation :
Archives départementales de la Manche
Réalisation et textes :
Jérémie Halais

sous la direction de Jean-Baptiste Auzel, conservateur en chef, directeur des archives départementales de la Manche

Crédits : tous les supports
Il peut arriver que l'histoire présentée ait été créée par un tiers indépendant et qu'elle ne reflète pas toujours la ligne directrice des institutions, répertoriées ci-dessous, qui ont fourni le contenu.
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