Les sciences à Versailles chapitre 5 : botanique et zoologie, le goût de l'exotisme

Afin de répondre au goût délicat des rois et reines pour l’exotisme, des techniques innovantes ont été développées pour que les ananas poussent et que les éléphants vivent dans le Parc de Versailles.

Instruction pour les jardins fruitiers et potagers, avec un Traité des Orangers, suivy de quelques Réflexions sur l'Agriculture (1690), Jean-Baptiste de La Quintinie (écrivain) et Claude Barbin (éditeur)Château de Versailles

La botanique

Véritable laboratoire de botanique, le Potager du roi, sous l’égide de Jean-Baptiste de La Quintinie, concentre les innovations les plus importantes. Il est à la fois une source d’approvisionnement alimentaire puisqu’il est destiné à fournir en fruits et légumes la table du roi, mais aussi un lieu de recherches scientifiques avec l’application de nouvelles techniques d’acclimatation et de forçage des légumes, grâce en particulier aux coûteuses serres chaudes et cloches de verre. Ainsi, la science trouve dans le jardin fruitier et le Potager du roi un moyen d’être à la fois utile et agréable, nécessaire et à la mode.

Jean-Baptiste de La Quintinie (1624-1688), intendant des jardins fruitiers et potagers du roi (1701/1800), Gravé par Cornelis Vermeulen, d’après Florent de La Mare-RichartChâteau de Versailles

Jean-Baptiste de La Quintinie (1624-1688)

Créateur et Premier jardinier du Potager du roi, il est le plus célèbre des jardiniers. Il est aussi le seul à avoir laissé une œuvre écrite, reconnue comme majeure dès sa publication posthume en 1690 : les Instructions pour les jardins fruitiers et potagers. L’ouvrage fait état de son expérience et de ses réflexions, en particulier concernant les méthodes de forçage des légumes et de taille des arbres fruitiers.

Recueil des plans des châteaux et jardins en Versailles, Plan du Potager du roi, 1720 (1720), Jean ChaufourierChâteau de Versailles

Plan du Potager du roi

Réalisé entre 1678 et 1683 par Jules Hardouin-Mansart (1646-1708) et Jean-Baptiste de La Quintinie, le nouveau potager de Versailles -qui s’étend sur presque 9 hectares- prend la relève de celui, trois fois plus petit, créé pour Louis XIII.

Comme l’indique le plan dessiné par Jean Chaufourier (1679-1757) en 1720, le Potager du roi est composé de seize grands carrés de légumes disposés autour d’un grand bassin, d’une grande terrasse plantée et tout autour, derrière de hauts murs, de vingt-neuf jardins clos plantés d’arbres fruitiers libres ou en espaliers, de légumes et de petits fruits.

Louis XV en vue des jardins de Trianon, de la nouvelle ménagerie et des basses-cours, du Pavillon français et du portique de treillage (1750/1751), Attribué à Jacques-André PortailChâteau de Versailles

Caféiers et ananas

Au XVIIIème siècle, réussir en un même lieu une production régulière de ces deux plantes si délicates et aux exigences si différentes relève de l’exploit.

Jeanne Bécu, comtesse Du Barry et Zamor qui lui apporte une tasse de café (1771/1800), Jean-Baptiste-André Gautier-DagotyChâteau de Versailles

Le caféier, originaire de l’est de l’Afrique, craint les grandes chaleurs, la lumière directe et, selon les espèces, la sécheresse.

Sous Louis XV, les botanistes tentent d'acclimater la plante et en 1762 les serres chaudes de Trianon abritent bel et bien un caféier.

Ananas dans un pot (1733), Jean-Baptiste OudryChâteau de Versailles

L’ananas, originaire du Nouveau Monde, est très sensible au froid et meurt rapidement si la température descend en dessous de 10 degrés Celsius.

En France, après de nombreuses tentatives infructueuses, ce n’est qu’à l’hiver 1733 qu’un ananas parvient à fructifier au Potager. Aussitôt, Louis XV demande à l’un de ses peintres préférés, Jean-Baptiste Oudry, d’en faire le « portrait ».

Nature morte au buste de l’Amérique (1722/1722), J.-B. Oudry - château de VersaillesChâteau de Versailles

Nature morte au buste de l'Amérique

Véritable allégorie du goût du Nouveau Monde, le Buste d'Amérique dans un parc, peint par Jean-Baptiste Oudry (1686-1755), représente la diversité des fruits exotiques nouvellement cultivés au Potager du roi, tels que les pêches, les figues et les melons. Cette œuvre fait partie d’un ensemble de quatre peintures associant des natures mortes à des bustes symbolisant les quatre parties du monde. Le cycle est commandé par le jeune Louis XV en 1722, année où il décide de la réinstallation de la Cour et du gouvernement à Versailles.

Établissement de l'Académie des sciences et fondation de l'Observatoire, 1666 par Henri TestelinChâteau de Versailles

La zoologie

Bien que créée pour l’agrément, la Ménagerie royale de Versailles participe au développement de la zoologie et de l’anatomie comparée en fournissant aux savants les cadavres de ses animaux. Pour la publication de son Histoire naturelle des animaux, Claude Perrault et l’anatomiste Joseph Du Verney, dissèquent des espèces rares soit à l’Académie des Sciences à Paris, soit même à Versailles en présence du roi. En janvier 1681, la dissection devant toute la cour de l’éléphant du Congo offert par le roi du Portugal, fut un véritable événement mondain.

« Un Éléphant de la Ménagerie de Versailles, étant mort, l’Académie fut mandée pour le disséquer ; M. Du Verney en fit la dissection, M. Perrault la description des principales parties, et M. de La Hire en fit les dessins : jamais peut-être dissection anatomique ne fut si éclatante, soit par la grandeur de l’Animal, soit par l’exactitude que l’on apporta à l’examen de ses parties différentes, soit enfin par la qualité et le nombre des Assistants : on avait couché le sujet sur un espèce de Théâtre assez élevé : le Roi ne dédaigna pas d’être présent à l’examen de quelques-unes des parties : et lorsqu’il y vint, il demanda avec empressement où était l’Anatomiste, qu’il ne voyait point ; M. du Verney s’éleva aussitôt des flancs de l’Animal, où il était, pour ainsi dire, englouti. »

Mémoires de l’Académie royale des sciences, Depuis 1666 jusqu’ à 1669, Paris, 1733.

La ménagerie exotique en 3D (2010), Château de VersaillesChâteau de Versailles

La Ménagerie exotique en 3D

Implantée au sud-ouest du parc de Versailles, la Ménagerie royale, bâtie par Le Vau en 1663-1664 (aujourd’hui disparue), était l'une des constructions les plus curieuses du règne de Louis XIV. Elle fut aussi la première grande commande architecturale de Louis XIV, alors même que Versailles n'était encore qu'un petit pavillon de chasse. Elle se composait d'un corps de logis relié, par une galerie, à un surprenant pavillon octogonal coiffé d'un dôme surmonté d'un lanternon, d'où rayonnaient sept cours réservées aux animaux.

View of the Palace of Versailles par Pierre PatelChâteau de Versailles

Le premier zoo au monde

Si la tradition d'entretenir près du souverain une collection d'animaux exotiques était connue dès l'Antiquité, celle de Versailles offrait un modèle résolument nouveau, repris dans toute l'Europe. La première innovation était de rassembler en un même lieu, permanent et non plus itinérant, les animaux autrefois dispersés dans les enclos des diverses résidences royales. Par ailleurs, la Ménagerie de Versailles était la première à opérer une classification des espèces, chacune étant répartie dans des cours adaptées.

Vue et perspective du salon de la Ménagerie par Éditeurs Esnauts & Rapilly et Jean-François DaumontChâteau de Versailles

La véritable scénographie élaborée par l’architecte, avec son plan radial et le rayonnement des cours à partir d'un point d'observation surélevé, en faisait un vrai divertissement pour la cour. C’est en cela qu’elle est considérée comme le premier zoo du monde. Elle a également joué un rôle important dans l'histoire des sciences, en contribuant, par les dissections opérées sur les cadavres d'animaux, aux progrès de l'anatomie comparée.

Les grands oiseaux étaient prédominants, mais on y trouvait aussi des éléphants, chameaux, autruches, crocodiles, tortues… Ce rassemblement prestigieux d'animaux exotiques et rares (provenant d'achats ou de cadeaux diplomatiques), que l'on présentait aux princes et ambassadeurs, participait directement de la politique de prestige et de magnificence de la Couronne.

Grand baromètre de Louis XV et Louis XVI, 1772-1776 (1772/1775), Jean-Baptiste Toré (opticien), Jean-Joseph Lemaire (sculpteur), Simon Mazière (doreur), Jean-Baptiste-Antoine Francastel (menuisier)Château de Versailles

La météorologie

Sous l’Ancien Régime, le climat joue un rôle capital. Une météo défavorable peut provoquer de mauvaises récoltes, entraînant disettes et famines. La science au service du climat permet ainsi de prévoir quelque peu les caprices du ciel et ce faisant, d’anticiper les catastrophes mais également de cultiver des fruits exotiques.

Le grand baromètre de Louis XV et Louis XVI

Exécuté en 1772-1775 par le sculpteur Jean-Joseph Lemaire, ce monumental baromètre sculpté est composé d’un arbre de laurier s'élevant d'une terrasse rocailleuse, supportant plusieurs attributs militaires, un globe aux armes royales, le tout entre deux figures d'enfants ailés semblant montrer le cadran. Le mécanisme est dû à l’opticien Jean-Baptiste Toré, et des réservoirs à mercure étaient initialement logés à l’intérieur de ces figures d’enfants. Ce baromètre, qui indique « beau fixe », constitue une véritable allégorie de la Paix.

Baromètre et thermomètre Réaumur, livrés pour Louis XVI en 1775 (1774/1775), Sculptés par Jean-Joseph LemaireChâteau de Versailles

Baromètre et thermomètre

Louis XVI possède six thermomètres et baromètres, parmi lesquels un thermomètre Réaumur, un autre à cadran, un baromètre construit par Cicery en 1773 et un baromètre et thermomètre à trois tuyaux. Dans ses Souvenirs le comte d’Hézecques raconte que le roi consulte trois fois par jour un thermomètre de cristal attaché à une fenêtre du salon d’Apollon.

Crédits : histoire

Catherine Pégard, Présidente du Château de Versailles

Laurent Salomé, Directeur du musée

Thierry Gausseron, Administrateur général

Hélène Delalex, conservateur du patrimoine et commissaire de l'exposition en ligne

Géraldine Bidault, responsable de la photothèque et de la numérisation des collections, commissaire de l'exposition en ligne

Ariane de Lestrange, Directrice de l'Information et de la Communication

Paul Chaine, Chef de service développement numérique

Gaëlle Bertho, coordinatrice de l'exposition en ligne

Crédits : tous les supports
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