Au XIXe siècle, la ferveur religieuse des Bretons retient l’attention des peintres qui représentent abondamment des scènes de pardons, ces fêtes religieuses et pèlerinages collectifs qui ont lieu chaque année autour des chapelles. Les pardons connaissent leur apogée au XIXe siècle avant de devenir des fêtes profanes folkloriques après la Première Guerre mondiale
Le Pardon de Kergoat (1891) by Jules BretonMusée des Beaux-Arts de Quimper
Jules Breton découvre en 1865 une ville de Bretagne encore peu connue, Douarnenez. Il y séjournera dix-huit fois. Il est fasciné par le folklore des foules colorées des pardons et le profond sentiment religieux des Bretons.
« Le Pardon de Kergoat » dépeint la piété collective des Bretons. Le dimanche qui suit l’Assomption, ce pardon réunit des milliers de fidèles venus des paroisses avoisinantes.
L'Arrivée du pardon de Sainte-Anne-de-Fouesnant à Concarneau
Ces pèlerins en costume de fête, portant bannières et statues, reviennent, en traversant la baie de Concarneau, du grand pardon de Sainte-Anne de Fouesnant, patronne des marins. Les jeunes filles de la première embarcation ont eu l’honneur de porter à terre le brancard sur lequel est placée la Vierge dorée et la bannière ornée d’étoiles de la sainte patronne. Deux solides pêcheurs traînent le bateau jusqu’au sable sec pour leur permettre de descendre. Les prêtres et fidèles se sont placés dans les innombrables embarcations qui suivent le cortège.
L’ensemble de la toile, noyée dans la lumière rosée du soleil couchant lorsque le ciel se confond avec les reflets de la mer, dégage une impression de calme et de piété populaire.
La Vierge du Folgoët
Catholique fervent, Maurice Denis s’intéresse particulièrement aux scènes de dévotion des paysans bretons. Le pardon du Folgoët, où il se rend presque chaque année, surtout de 1921 à 1934, retient son attention. Ce pardon près de Lesneven (Finistère) attire alors chaque année des milliers de pèlerins le premier dimanche du mois de septembre.
En costumes de fête, hommes, femmes et enfants se rendent à la basilique édifiée au milieu du XVe siècle. La grand-messe, souvent en plein air devant l’affluence, se déroule vers 11h. L’après-midi, a lieu une grande procession avant que les fidèles ne procèdent à des rites dont ils espèrent miracles et guérisons : se verser sur le corps de l’eau de la fontaine guérisseuse ou comme dans cette œuvre, toucher ou embrasser la statue de la Vierge à l’enfant placée entre deux autels de la basilique.
Retour du pardon de Sainte-Anne-la-Palud (1859) by Louis DuveauMusée des Beaux-Arts de Quimper
Louis Duveau, en peignant le retour des pèlerins de Douarnenez du célèbre pardon de Sainte-Anne-la-Palud et en détaillant les souvenirs qu’ils en ont rapportés, souligne le caractère profane de la fête : à chaque pardon, les cabarets en plein air, les chanteurs de complaintes, les marchands d’images, … attirent les pèlerins dès la sortie de la messe.
La Marchande de jouets (1920) by Charles GodebyMusée des Beaux-Arts de Quimper
Dès la fin de la grand-messe, les pèlerins se pressent sous les tentes des cabarets et des marchands ambulants, comme cette marchande de jouets. Charles Godeby joue habilement des couleurs vives des broderies et des rubans des costumes pour animer sa toile et traduire l’ambiance de fête.
Bigoudène devant tréteaux
Depuis le début du XXème siècle, les peintres s'intéressent davantage à la dimension profane du pardon. A la fête patronale et à ses processions recueillies, on préfère ainsi désormais décrire l'animation joyeuse de la fête foraine.Comme beaucoup de peintres de sa génération, Lucien Simon est séduit par le spectacle coloré des Bigoudens et Bigoudènes en costume de fête rassemblés auprès des tréteaux. Sans doute s'agit-il ici du pardon de Notre-Dame-de-la-Joie, l'un des plus populaires pardons bigoudens, durant lequel les cirques et les manèges avaient pris l'habitude depuis la fin du XIXe siècle de s'installer à proximité de la chapelle.
Parade de foire
Avec cette monumentale "Parade de foire", datée de 1919, Lucien Simon décrit avec verve l’animation cocasse qui mêle le profane et le sacré. La maîtrise du peintre dans l’art de composer est à son apogée et mélange habilement les groupes traités en frise et les raccourcis audacieux. La petite écuyère s’échappant sur la droite introduit une fantaisie colorée superbe autant qu’elle traduit une forme d’instantané photographique. Quant à l’usage des couleurs de la palette, il confirme la virtuosité de Simon qui n’est jamais autant à l’aise que dans les oppositions entre teintes claires et teintes sombres.
Femmes de Plougastel au pardon de Sainte-Anne-la-Palud (1904) by Charles CottetMusée des Beaux-Arts de Quimper
Charles Cottet décrit cinq femmes de Plougastel-Daoulas au pardon de Sainte-Anne-la-Palud, réunies pour déjeuner un peu à l’écart des groupes rassemblés autour des tentes des marchands et des débits de boisson. Dans cette composition savamment mise en scène, l’artiste joue avec subtilité sur les couleurs des coiffes, des rubans et des tabliers, créant un beau décor de fête.
Armor : La rapsode foraine by Jean MoulinMusée des Beaux-Arts de Quimper
Les oeuvres de Jean Moulin illustrant le recueil de poèmes « Armor » de Tristan Corbière et notamment « La Rapsode foraine et le pardon de Sainte-Anne » tranchent avec le caractère joyeux privilégié par les artistes à cette époque : il met en scène la mort rôdant autour des mendiants et estropiés venus chercher indulgence et guérison.
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