Cartographie du vin espagnol

Les vignes s'étendent du nord au sud. Elles sont façonnées par les montagnes et la mer, et s'épanouissent tantôt en bordure de fleuve, tantôt sur la côte. Le vin fait partie de l'histoire du pays, et il n'existe pas une seule région qui n'en produit pas. Il peut être blanc, rouge, rosé, mousseux ou fortifié, issu d'assemblages frais ou chaleureux, sec ou doux, dégager des notes florales, herbacées ou minérales : les possibilités sont presque infinies sur des terres aussi riches et variées.

Nous entamons cette visite dans le nord-est de la péninsule Ibérique, en Galice. C'est ici que l'on produit les célèbres appellations Ribeiro et Rías Baixas, mais également Monterrei, Valdeorras, Ribeira Sacra, Betanzos et Barbanza. Si chacun de ces lieux possède des particularités propres, ils ont un point commun : un climat régional frais qui se goûte dans les vins qui y sont élaborés.

Les vins les plus connus sont les blancs, en particulier l'albariño et le godello, mais la Galice regorge d'autres cépages, tels que le loureira et le torrontés. Parmi les vins rouges, citons le mencía, le sousón et le brancellao, qui sont légers, agréables et digestes.

Nous poursuivons ce périple du côté du golfe de Gascogne, dans trois des régions autonomes d'Espagne : les Asturies, la Cantabrie et le Pays basque. La tradition viticole des deux premières est moins ancrée, mais elles produisent des vins étonnants et de grande qualité depuis plusieurs années.

Cangas, qui bénéficie de son appellation d'origine, est une ville des Asturies dotée de vignobles où poussent des raisins particulièrement impressionnants (albarín et carrasquín, par exemple). Ceux-ci permettent des assemblages harmonieux avec des cépages plus courants, tels que l'albillo et le mencía. Il en résulte des vins qui débordent de personnalité et présentent une belle acidité.

La Cantabrie comporte deux zones vinicoles proches, mais différentes : la Costa de Cantabria et les Tierras de Liébana. Les viticulteurs y associent des variétés de l'est et de l'ouest : mencía et hondarribi beltza, ainsi que albariño et hondarribi zuri. Ensuite, ils ajoutent des fruits d'ici et de là pour créer un vin dont chaque gorgée rappelle la brise de mer.

caractéristique s'est adoucie au fil du temps, gagnant ainsi en complexité et en saveur. Ces vins d'exception peuvent être consommés tant à des fins récréatives que pour accompagner un délicieux morceau de poisson. Ils sont produits dans trois provinces basques : le Guipuscoa, la Biscaye et l'Alava.

S'il y a un endroit où l'odeur du vin flotte dans l'air, c'est bien La Rioja. Riche de domaines viticoles historiques ayant adopté des méthodes classiques venues de France, cette région abrite une multitude de raisins tempranillo et d'innombrables fûts en chêne. Elle possède en outre une empreinte distinctive. L'appellation d'origine Rioja couvre trois zones situées sur les rives de l'Èbre, appartenant chacune à une région autonome différente : La Rioja, le Pays basque (province d'Alava) et la Navarre.

Ces vins peuvent être dégustés dès aujourd'hui, mais jouissent également d'un potentiel de vieillissement hors du commun. D'autres cépages rouges, tels que le garnacha, le mazuelo et le graciano, sont assemblés avec le tempranillo afin de produire aussi bien des vins jeunes à consommer dans l'année que des vins qui vieilliront en fûts de bois pendant une longue période. Il y a un moment et un lieu adaptés à chacun d'eux.

La Navarre toute proche, dans l'arrière-pays, possède une longue tradition viticole, qui met notamment à l'honneur le garnacha. Surtout connue pour ses rosés vifs, on y trouve de plus en plus de vins rouges savoureux, plus sérieux, et parfois du tempranillo. Il s'agit de vins gastronomiques qui s'apprécient au mieux en accompagnement des nombreux produits alimentaires de la région.

N'oublions pas l'Aragon, associée aux appellations Cariñena, Calatayud, Somontano et Campo de Borja. On y trouve énormément de garnacha robuste, qui perd néanmoins du terrain à la suite de l'arrivée de nouveaux viticulteurs en quête de vins plus doux et moins alcoolisés.

Arrêtons-nous maintenant en Catalogne. Du nord au sud, à l'intérieur des terres et le long de la côte, elle nous offre une grande variété de cépages et de styles, grâce à ses nuances climatiques et à sa diversité d'altitudes. Les vins qui y sont élevés ont un parfum de Méditerranée et sont marqués par l'influence de ses terres.

Leur gamme s'étend de la structure minérale d'un priorato à la spontanéité d'un montsant. Les vignerons utilisent des cépages espagnols classiques, qu'ils associent avec d'autres variétés locales, telles que le pansa blanca, le picapoll et le sumoll. La diversité de cette région pleine de surprises se reflète dans le nombre de ses appellations d'origine : Penedès, Terra Alta, Tarragona, Conca de Barberà, Costers del Segre, Empordà et Alella.

On y élabore des vins blancs, rouges, rosés et, bien sûr, mousseux. En effet, cette région autonome produit du cava de grande qualité. Les bulles de ces vins sont obtenues à l'aide d'une méthode traditionnelle. Ils contiennent généralement du macabeo, de la parellada et du xarel-lo. Vifs et fougueux, ils sont dotés d'un caractère festif, mais ils sont tellement polyvalents qu'ils peuvent aussi accompagner à merveille tout un repas.

Poursuivons dans l'est de l'Espagne, pour explorer des endroits plus chauds, autour de Valence et Murcie. Dans les terres, des cépages résistants sont cultivés sous des climats extrêmes. Le bobal est le roi de la zone Utiel-Requena, dans la région de Valence, tandis que la variété la plus fréquente de la ville murcienne de Jumilla est le monastrell. Il en va de même pour d'autres terroirs de Valence, ainsi que pour les communes de Yecla et de Bullas dans la région de Murcie.

Les raisins de ces deux cépages présentent un poids et une teneur en sucre qui donnent naissance à des vins agréables et généreux, à condition d'être traités avec soin. Leurs arômes fumés et leur puissance se marient très bien avec les plats proposés dans l'arrière-pays, à base d'agneau ou de gibier, par exemple.

Sans quitter la Méditerranée, nous allons maintenant faire escale sur les îles Baléares. Majorque rime également avec vin (bon vin, en l'occurrence). On y retrouve le monastrell, qui, ici, est associé à des cépages uniques, tels que le callet et le manto negro. L'île est connue pour ses vins rouges qui, bien que semblables à ceux de l'est de l'Espagne, sont frais, doux, fruités et généreux.

Changeons d'archipel pour nous intéresser aux îles Canaries, où l'on produit de succulents vins, dont la qualité et la quantité vont croissantes. L'île de Lanzarote a été pionnière dans le partage des connaissances liées à son savoir-faire. Les raisins blancs de type malvasia, tantôt doux, tantôt secs, sont cultivés sur de la lave solide.

Même les sols les plus pauvres de La Palma donnent d'excellentes cuvées. C'est de nouveau le malvasia qui s'épanouit sur ses montagnes inhospitalières. Naturellement doux, complexes et très nuancés, ces vins accompagnent parfaitement les fromages intenses de la région.

L'île de Tenerife s'est particulièrement démarquée au cours de ces dernières années, plus précisément les villes de Tacoronte et de La Orotava. Le listán blanca, le listán negra, le vijariego et le baboso sont tous des cépages locaux qui, en combinaison avec le sol volcanique, apportent des arômes qui ne cesseront de vous étonner et qui confèrent des notes fruitées aux meilleurs vins fumés.

Attachons-nous maintenant à une autre grande région viticole d'Espagne, Castille-et-León, qui compte l'une des appellations d'origine les plus connues : Ribera del Duero. Elle accueille des sociétés viticoles telles que Vega Sicilia, qui bénéficie d'une renommée internationale. Ses vins sont élaborés à base de tinta del país (autre nom du tempranillo). Ils se distinguent par un caractère richement fruité parfois masqué par le côté boisé des fûts dans lesquels ils sont élevés. L'ensemble de la région repose sur un terroir austère.

On y trouve toutefois bien d'autres appellations : Arlanza, Arribes, Bierzo, Cigales, Sierra de Salamanca, Toro ou encore Cebreros. Cette grande variété reflète l'identité unique de chaque lieu. Les vins possèdent en général ce que l'on appelle leur "typicité", les raisins de chaque ville étant de plus en plus mis en avant. Par ailleurs, le travail des générations passées éveille un nouvel intérêt. La Castille-et-León englobe également l'appellation Rueda, connue pour ses raisins blancs verdejo. Ce cépage donne de bons vins lorsqu'ils sont élaborés dans le respect de la tradition.

Le verdejo et le tempranillo sont également les principales variétés présentes en Castille-La Manche. Plus grande région viticole du monde, elle comprend d'importantes appellations telles que l'appellation Valdepeñas, mais également Almansa, Manchuela, Uclés, Toledo, ainsi que Ciudad Real.

Le caractère de ces lieux transparaît dans leurs vins, façonnés par l'altitude, les conditions météorologiques, la composition du sol et des cépages variés tels que l'airén, le garnacha et le moravia. Allant de frais et légers à chaleureux et corsés, ces vins présentent des notes tantôt timides, tantôt exubérantes.

Au centre, Madrid tient fièrement son rang en matière de production vinicole. Les cépages blancs cultivés ici sont le malvar et l'airén. On y trouve également le tempranillo, omniprésent, ainsi que deux variétés qui se sont particulièrement distinguées ces dernières années : l'albillo et le garnacha. Les raisins qui poussent dans le massif montagneux de la sierra de Gredos et aux alentours sont assemblés avec leurs voisins castillans. Il en résulte des vins frais et élégants, dont les notes rappellent les roches qui portent les vignes. Vous profitez ainsi d'une bouteille pleine de finesse, offrant une belle longueur en bouche.

Ces vins ont évolué et ressemblent désormais aux vins légers et savoureux de plus en plus fréquents en Estrémadure, à l'image du "pitarra", élevé dans des récipients en argile. Un vrai délice. Des cépages inhabituels, tels que l'alarije, le borba, le cayetana blanca, le bobal et le mazuelo, tirent parti des sols peu fertiles pour donner le meilleur d'eux-mêmes.

Étudions à présent l'Andalousie, qui constitue à elle seule un monde viticole. Elle possède une grande diversité de conditions climatiques et de sols, ainsi que huit appellations d'origine, seize indications géographiques et de nombreux autres beaux vins en dehors de ces catégories. On y trouve de très bons vins non mousseux, blancs et rouges, issus des montagnes de Malaga et de Grenade, mais aussi de Cordoue, de Cadix et même de Séville.

Toutefois, s'il y a un produit qui caractérise la région, c'est le vin fortifié. Le vin orange d'Almería (un vin doux infusé à l'écorce d'agrumes), le muscat de Malaga et le pedro ximénez de Montilla-Moriles ne sont que quelques exemples des fantastiques produits andalous.

Les vins de l'appellation d'origine Jerez-Xérès-Sherry représentent une catégorie à part entière. Leur caractère unique découle de leur méthode de production et du sol blanc crayeux de type "albariza" sur lequel poussent les vignes. Cela leur confère une qualité magique et en fait des vins savoureux, séduisants, vifs et très concentrés. Il en existe différents types, en fonction de leur lieu d'origine, de leur processus de vieillissement et de leur teneur en alcool. Les raisins qui les composent ne sont pas issus d'une année de production précise, et le vieillissement a lieu selon le système de la solera.

Ce mode de production unique implique un vieillissement biologique. Tout commence avec un vin blanc appelé "moût", auquel on ajoute de l'alcool afin de favoriser la constitution d'un voile de flor. Il s'agit d'un type de levure qui se développe naturellement à la surface du vin, qui le recouvre complètement et en empêche l'oxydation. En fonction du type de vin, il est conservé plus ou moins longtemps dans des fûts de chêne américain. Ainsi, la gamme s'étend des jeunes finos et manzanillas aux vieux amontillados. Sans la levure, une oxydation interviendrait au cours du processus de vieillissement, et on obtiendrait un oloroso.