Les
rites
rythment la vie d'un grand nombre de sociétés de par le monde, et
peuvent se manifester notamment sous la forme de célébrations, de
spectacles ou de réunions d'initiés. Le plus souvent, le rite offre
l'occasion d'entrer en contact avec le monde de l'invisible, celui
des ancêtres, des esprits et
des dieux, pour demander conseil, accéder
à un certain savoir ou s'attirer leurs
bonnes grâces. Si certains sont bienfaisants, d'autres au contraire
sont responsables de toutes sortes de calamités, telles que de
mauvaises récoltes, les maladies, la stérilité… Suivant un
ensemble de pratiques bien définies par
le rituel,
le ou les officiants cherchent alors à entrer en communication avec
l'au-delà, soit pour trouver l'entité responsable des malheurs et
tenter de trouver une entente avec elle, soit pour honorer
un dieu et lui demander de restaurer l'équilibre. La célébration du
rite représente également un moment fort
de la vie sociale dans
la mesure où chaque participant revit
la confirmation de son appartenance à la communauté.
I - Chamanisme
et exorcisme
Intercéder auprès des dieux et esprits pour leur demander protection
Corée. Rituel chamanique ssitgimgut
Chamanes de ssitgimgut. Le chamanisme est un élément essentiel de la pensée coréenne et la pratique rituelle la plus ancienne de ce peuple aux origines sibériennes. En Corée, chamanisme, bouddhisme et taoïsme co-existent depuis des siècles dans une véritable symbiose.
Rituel chamanique ssitgimgut - Corée Rituel chamanique ssitgimgut - Corée (2016-04-10), Guénet, FrançoisMaison des Cultures du Monde - Centre français du patrimoine culturel immatériel
Le rôle du gut est de rétablir l’équilibre dans la communauté. Ces rituels prennent diverses formes selon les régions de Corée et leur fonction. Ce peuvent être des rites de cure où la chamane, oracle et guérisseuse, s’engage dans un dialogue avec les esprits pour résoudre les troubles d’une personne ou d’une famille (conflits, maladies, échecs, stérilité…).
Rituel chamanique ssitgimgut - Corée Rituel chamanique ssitgimgut - Corée (2016-04-10), Guénet, FrançoisMaison des Cultures du Monde - Centre français du patrimoine culturel immatériel
Ce peuvent être aussi des rituels funéraires comme le ssitgimgut de l’île de Jindo qui purifie les âmes des défunts avant de les conduire vers l’au-delà, des offrandes de divertissement aux esprits ou aux divinités comme le pyolshingut où l’on retrouve les masques des danses talchum du village de Hahoe ou le cheolmurigut de la province de Hwanghae offert à Jaesuk, divinité de la prospérité et de la fertilité d’origine taoïste et bouddhique.
Gopuri. Ce terme signifie « dénouer les fils emmêlés ». Les nœuds symbolisent ici les rêves inassouvis, les souffrances, l’amertume du défunt. Ces fils sont figurés par une longue bande de tissu blanc dont on défait les nœuds un à un avec des chants et des incantations. On aborde ici un moment crucial du ssitgimgut car la facilité ou la difficulté à défaire ces nœuds permet de prédire si l’amertume du défunt se dissipera.
Si dans les temps anciens les chamanes étaient autant des hommes que des femmes, cette fonction est depuis plusieurs générations dévolue aux femmes, leurs maris les accompagnant comme musiciens.
Rituel chamanique ssitgimgut - Corée Rituel chamanique ssitgimgut - Corée (2016-04-10), Guénet, FrançoisMaison des Cultures du Monde - Centre français du patrimoine culturel immatériel
La chamane, appelée mudang, occupe une position essentielle dans la vie de beaucoup de gens. Intermédiaire avec le monde des esprits, elle seule est capable d'exorciser les démons et de rétablir l’harmonie dans la société. Certaines sont appelées à devenir chamanes par des rêves, des maladies, des désordres suivis d’une initiation. D’autres le sont de manière héréditaire. Les premières sont oracles et guérisseuses, les secondes sont des prêtresses.
Le gut comporte une composante spectaculaire importante basée sur la danse, le chant, la musique et l'utilisation de divers accessoires d'une grande beauté plastique. Le gut n’est pas qu’un rituel, c’est aussi un spectacle offert aux esprits, aux divinités et aux hommes.
Nuo du Jiangxi et du Anhui - Chine Nuo du Jiangxi et du Anhui - Chine (2008-04-10), Robert, Marie-Noëlle - Théâtre équestre ZingaroMaison des Cultures du Monde - Centre français du patrimoine culturel immatériel
Chine. Nuo du Jiangxi et du Anhui, théâtre d'exorcisme
Les rituels du nuo ont lieu chaque année au moment de la Fête du printemps, premier jour du Nouvel An chinois, dans de nombreux villages du sud de la Chine. L'arrivée du printemps est source de renouveau, les dieux protecteurs du village sont alors invités à descendre sur terre, à s'incarner dans des masques, afin que les villageois puissent se placer sous leur protection pour l'année à venir et leur demander de faire le « grand ménage » parmi les démons et mauvais esprits qui rôdent autour et parfois même à l'intérieur des foyers, causant toutes sortes de tracas et calamités.
Nuo de Nanfeng, village de Shiyou. Zhi Qian, dieu des offrandes d'argent de papier. Le premier dieu à se manifester est Kaishan, l'ouvreur de montagnes. Puis vient Zhi Qian, et tous deux appellent les autres dieux à les rejoindre.
Nuo de Guichi, villages de Dangliyao et Xihuayao. Wusan, ou danse de l'ombrelle. Des offrandes sont faites dans plusieurs temples par un petit groupe d'officiants, dont l'un d'eux fait tournoyer une ombrelle. Le rôle de cette dernière est très important dans le nuo de Guichi : elle représente le ciel et les dieux descendent sur terre le long de son manche.
Nuo du Jiangxi et du Anhui - Chine Nuo du Jiangxi et du Anhui - Chine (2008-04-10), Robert, Marie-Noëlle - Théâtre équestre ZingaroMaison des Cultures du Monde - Centre français du patrimoine culturel immatériel
À Guichi, interviennent également des dieux empruntés au taoïsme, tels les cinq Étoiles de la chance, de la prospérité, de la richesse, de la longévité et du bonheur (Fu, Lu, Shou, Xi et Cai Xing), auxquels s'ajoute Kui Xing, le dieu-étoile de la réussite aux examens, à qui il suffit de toucher une personne de son pinceau pour qu'elle réussisse ses examens.
Sou Nuo, cérémonie d'exorcisme. Kaishan, l'ouvreur de montagnes et Zhong Kui, le pourfendeur de démons agitent leurs chaînes magiques et chassent le petit démon, qui se débat comme un beau diable.
Calonarang de Bali - Indonésie Calonarang de Bali - Indonésie (1993-06-12), Dumontier, Jean-Paul - Théâtre du Rond PointMaison des Cultures du Monde - Centre français du patrimoine culturel immatériel
Indonésie. Le calonarang de Bali
Considéré comme wali (sacré), le calonarang, rituel dansé magico-religieux, ne devrait être présenté que dans les temples ou dans les lieux proches des cimetières, car il a des fonctions exorcistes. Le contenu narratif souligne l’intensité des combats de magie qui se déroulent pour la sauvegarde de la communauté.
Calonarang de Bali - Indonésie Calonarang de Bali - Indonésie (1993-06-12), Dumontier, Jean-Paul - Théâtre du Rond PointMaison des Cultures du Monde - Centre français du patrimoine culturel immatériel
Le long poème Kidung Calonarang relate les traîtrises et les méfaits d’une sorcière : Calonarang, dont la personnalité évoque Baghavati, Durga et Kali, ces toutes-puissantes déesses de l’hindouisme, religion qui marqua fortement la culture balinaise.