Conception : Institut national de la propriété industrielle
Musée de la batellerie et des voies navigables, ville de Conflans-Sainte-Honorine, France
Introduction
Le fleuve et la rivière sont à la fois une source inépuisable d’énergie et un moyen efficace de transport pour l’homme qui n’a pas cessé d’inventer des aménagements, des procédés, des mécaniques de toutes sortes, pour en tirer le meilleur profit. Au XIX° siècle, le réseau des voies navigables se développe de façon significative.
Charles Dallery, facteur d'orgues et mécanicien, est le premier à avoir l'idée d'appliquer l'hélice à la navigation à vapeur et prend à cet effet un brevet d'invention en 1803. Il entreprend alors de construire un bateau sur ce principe, mais son invention ne reçoit pas l'appui financier escompté. A la même époque, d'autres inventeurs comme l'Américain Robert Fulton ou le marquis de Jouffroy d'Abbans se lancent eux aussi dans l'aventure de la propulsion maritime.
Présentons désormais quelques grandes innovations et thématiques liées au transport, à la propulsion des bateaux ou encore à différents bateaux aux usages parfois curieux.
Bateaux remorqueurs mis en mouvement par la force des animaux, appelés bateaux zooliques (1821-07-28), Pierre-Alexandre GUILBAUD. Brevet d'invention de 5 ans déposé le 28.07.1821 pour des bateaux remorqueurs mis en mouvement par la force des animaux, appelés bateaux zooliques. (1BA1571, archives INPI)Institut national de la propriété industrielle
La propulsion
En l’absence de vent ou de courant pour faire avancer un bateau, il faut embarquer à son bord de l’énergie en quantité suffisante et un propulseur efficace pour la dissiper pour que le bateau avance.
La configuration la plus élémentaire est celle d’un homme ramant avec des avirons. L’idée de le remplacer par un animal, un âne, un cheval ou encore un bœuf, donnera naissance aux bateaux dits zooliques.
Dans ce brevet, il s'agit d'un remorqueur équipé de planchers mobiles en forme de « tapis roulants » reliés par un mécanisme à deux roues à aubes. Le tout est mis en mouvement par un cheval ou plusieurs chevaux.
D'autres solutions sont également envisagées pour optimiser la propulsion des bateaux. En voici quelques exemples développés à mesure du temps :
Mécanisme propre à faire mouvoir des bateaux par le moyen d'une machine à feu (1791-11-26), John FITCH. Brevet d'invention de 15 ans déposé le 26.11.1791 pour un mécanisme propre à faire mouvoir des bateaux par le moyen d'une machine à feu. (1BA1990, archives INPI)Institut national de la propriété industrielle
L'américain John Fitch et la "machine à feu" (1791)
Mémoire descriptif : "Monsieur Jean (sic) Fitch est l’inventeur d’une machine propre à faire mouvoir Bateaux Navires et autres Bâtiments où le feu sert de mobile agissant par le moyen de bouilloires, cylindres, pistons, pompe d’air, roue et chaînes de fer (...)"
La bâteau anguille par James WHITE. Brevet d'invention déposé le 20.10.1795 pour un navire brisé, appelé anguille (1BA73).Source d'origine : archives INPI
Le bateau-anguille (1798)
James White, un mécanicien anglais résidant à Paris, déclare que la résistance à la marche d’un bateau est proportionnelle à la surface qu’il présente au courant. En conséquence, il propose de diviser le contenu d’un grand et large bateau en plusieurs en plusieurs batelets longs et étroits, assemblés entre eux avec un système de charnières de sa conception.
Transport sur terre et sur mer (1803-03-29), Charles DALLERY. Brevet d'invention de 5 ans déposé le 29.03.1803 pour un mobile perfectionné, appliqué aux voies de transport par terre et par mer (1BA9, Archives INPI)Institut national de la propriété industrielle
Charles Dallery et le transport par terre et par mer
Le brevet porte sur un mobile équipé d’une machine à vapeur, appliqué au transport sur la terre et sur mer ainsi que sur un dispositif de propulsion pour les navires constitué de deux spirales, l’une à l’avant et l’autre à l’arrière du bateau, les deux étant mises en mouvement par une même mécanique.
Charles Dallery tentera d’en réaliser un prototype qui n’aboutira pas faute de moyens financiers.
Le pyréolophore des frères Niepce (1806-11-12), Joseph-Nicéphore et Claude NIEPCE. Brevet d'invention de 10 ans déposé le 12.11.1806 pour le pyréolophore, machine dont le principe moteur est l'air dilaté par le feu, propre à mettre en mouvement toutes sortes de mécaniques. (1BA0395, archives INPI)Institut national de la propriété industrielle
Le pyréolophore, un moteur des Frères Niepce
Avant de s’intéresser à la photographie Nicéphore Niepce et son frère Claude ont dépensé une bonne part de leur fortune et pas mal d’énergie à la mise au point du Pyréolophore, le premier moteur à combustion interne qui n’ait jamais existé.
Malgré des essais prometteurs, il ne connaîtra pas d’application avant la fin du siècle.
Propulseur amovible pour bateaux (1919-06-03), Société des établissements E. FEUILLETTE. Brevet d'invention de 15 ans déposé le 03.06.1919 pour un propulseur amovible pour bateaux. (2BE511870, archives INPI)Institut national de la propriété industrielle
Au XXe siècle, le propulseur amovible pour bateaux
« L’invention est relative à un propulseur à hélice amovible, établi de telle manière qu’il puisse être monté, sans modifications essentielles, sur les péniches ou chalands du type courant afin de les rendre autonomes. »
Système mécanique propre à la remonte des rivières par l'effort du courant (1825-10-13), Vincent-Louis-Frédéric SIMONARD. Brevet d'invention de 15 ans déposé le 13.10.1825 un système mécanique propre à la remonte des rivières par l'effort du courant. (1BA2305, archives INPI)Institut national de la propriété industrielle
Le halage
Le halage est un mode de traction terrestre des bateaux fluviaux : il s'agit de les faire avancer le long d’une rivière au moyen d’une corde tirée à la force des bras ou par des chevaux.
Le brevet a pour objet un bateau équipé d’un mécanisme entraînant des perches prenant appui alternativement sur le fond de la rivière. L’énergie de cette mécanique est fournie par une roue à aubes entrainée par le courant permettant ainsi à l’ensemble de progresser à la remonte.
Le touage
Qu'est-ce que le touage ? C'est une technique de traction à chaîne pour les bateaux sans moteur, là encore destinée à leur faire remonter les cours d'eau.
Le bateau mouche par Michel FÉLIZAT. Brevet d'invention déposé le 14.12.1857 pour un système de bateau toueur par l'avant et par l'arrière (1BB34695).Source d'origine : archives INPI
Michel Felizat, système de bateau toueur par l'avant (1857)
Michel Felizat est constructeur de bateaux à Lyon. La manœuvre consiste à faire avancer le bateau toueur qui déroule derrière lui un câble, une fois ce dernier complétement déroulé, il s’immobilise au milieu de la rivière et hale avec le treuil arrière les chalands à remonter.
Un système de remonte rivière (1817-03-01), Pierre-François MONTGOLFIER et Louis-Henri-Daniel D'AYME. Brevet d'invention de 15 ans déposé le 01.03.1817 pour un nouveau système de remonte des rivières. (1BA1040, archives INPI)Institut national de la propriété industrielle
Le remonte-rivière de Montgolfier
Pierre François de Montgolfier (1775-1856) est le fils de Joseph Montgolfier, le célèbre aérostier. Sa demande de brevet consiste en un système de remonte assuré par un remorqueur équipé d’une machine à vapeur chargée de mettre en mouvement un ensemble de treuils et de poulies qui vont lui permettre de se touer à l’aide d’un cordage dont une extrémité est amarrée à un point fixe sur la berge.
L’autre extrémité étant portée en amont pour créer un nouveau point d’appui au fur et à mesure de l’avancement du convoi et ainsi d’assurer une marche continue.
En plus d'innover avec des solutions techniques adaptées aux problèmes de navigation, les inventeurs brevetés du XIXe siècle redoublent d'imagination : ils proposent toutes sortes de bateaux, des plus pratiques aux plus utopiques.
Bateaux divers, bateaux curieux
La rivière est également une source d’inspiration pour toutes sortes de projets n’ayant aucun rapport avec le seul transport.
Le bateau-scierie (1872-01-23), Pierre SAULNIER. Brevet d'invention de 15 ans déposé le 23.01.1872 pour un bateau-scierie. (1BB93975, archives INPI)Institut national de la propriété industrielle
Le bateau-scierie (1872)
Mémoire descriptif de l'invention : « Nous constituons ainsi une scierie portative présentant les avantages de scieries fixes puisqu’en réalité le matériel est fixé sur le bateau et que c’est le véhicule qui se transporte là où les nécessités de l’exploitation l’exigent. »
Appareil d'hydrothérapie (1888-06-17), Jean-Baptiste BASTIEN. Brevet d'invention de 15 ans déposé le 16.06.1888 pour un système d'appareils de lavage, de séchage, de balnéation, d'hydrothérapie, d'aérothérapie, etc., dit système ambulant et dialytique. (1BB191763, archives INPI)Institut national de la propriété industrielle
Utopiques : appareils de lavage et d'hydrothérapie
"La présente invention consiste en une méthode de lavage et de séchage applicable aussi bien aux matières inorganiques qu’aux êtres et aux corps organisés, végétaux ou animaux, vivants ou non, ainsi qu’aux appareils destinés à l’application de cette méthode."
Le bateau aquarium (1877-08-01), Gustave LENNIER et BRULE. Brevet d'invention de 15 ans déposé le 01.08.1877 pour un bateau aquarium. (1BB119708, archives INPI)Institut national de la propriété industrielle
Le bateau-aquarium (1877)
Comme son nom l’indique ce bateau est destiné à servir d’aquarium. Il est équipé d’une machine à vapeur qui a plusieurs fonctions : le remplissage et la circulation de l’eau en circuit fermé dans les bacs mais également le fonctionnement d’une pompe à air pour « aérer » l’eau, condition indispensable à la survie des occupants. Une promenade est prévue sur le pont supérieur du bateau.
Le bateau-ballon (1892-04-11), Georg GABRIELÜ. Brevet d'invention de 15 ans déposé le 11.04.1892 pour un ballon-bateau (1BB220825, Archives INPI)Institut national de la propriété industrielle
Ballon-bateau : un bateau volant
Un bateau qui vole, un ballon qui navigue, quoi de plus poétique pour conclure cette exploration des inventions fluviales ?
Services des archives de l'Institut national de la propriété industrielle en partenariat avec le Musée de la batellerie et des voies navigables, ville de Conflans-Sainte-Honorine.
Recherches et textes de François Casalis.