Lluís Borrassà, second fils du peintre Guillem Borrassà, est l'un des membres de la famille de peintres originaires de Girona qui travaillèrent dans notre pays depuis le milieu du XIVe jusqu'à la moitié du XVe siècle. Des documents attestent qu'en 1383 Lluís Borrassà avait ouvert un atelier de peinture dans la ville de Barcelone, atelier qui se transformerait rapidement en l'un des plus grands de la ville. De nombreux artistes, assistants et collaborateurs y travaillèrent. Son arrivée à Barcelone correspond à l'époque où le style italo-gothique, qui domina notre pays tout au long de la seconde moitié du XIVe siècle et dont le principal diffuseur avait été l'atelier des frères Serra, s'épuisait et entamait sa décadence. Le nouvel art gothique international qui commençait à fleurir en Flandre, à Paris ou à Milan laissait de côté l'équilibre et l'harmonie sobre des formes et des couleurs que les peintres siennois du quatorzième siècle avaient mis à la mode pour introduire une nouvelle esthétique naturaliste basée sur le dynamisme et le mouvement des personnages et sur l'utilisation de pigments de couleurs très vives et contrastées. Le Musée Épiscopal conserve probablement la collection la plus représentative d'oeuvres de Lluís Borrassà. À travers elles, nous pouvons suivre l'entrée et l'évolution de ce nouveau courant artistique dans son oeuvre. Le retable de sainte Claire est l'oeuvre la plus importante que l'on ait conservée de l'artiste. Elle a été unanimement considérée l'une des oeuvres capitales de la peinture européenne du premier gothique international. L'évêque Morgades l'acheta, vers 1889, pour le futur Musée à l'occasion de la démolition de l'église du couvent de Santa Clara Vella de Vic, lorsque l'on procéda à l'ouverture de la nouvelle 'rambla' de la ville. On conserve le document de la quittance finale du retable, datée du 27 juillet 1415, sur laquelle on note que Borrassà toucha 200 florins en or sans compter la menuiserie. Au centre du retable, sous la partie supérieure qui représente le Calvaire, on voit la scène de saint François (d'Assise), sa blessure ouverte, intronisé, livrant la Règle à sainte Claire et aux moines, instituant les trois ordres franciscains. En dessous, se trouve le panneau consacré au triple vocable du retable avec l'archange saint Michel, Notre-Dame de l'Espérance et sainte Claire symboles que, selon Ruiz Quesada, on doit relier aux voeux d'obéissance, de chasteté et de pauvreté. Le contenu iconographique général du retable souligne l'importance des franciscains et des dominicains dans la prédication de l'évangile et l'espérance du salut des hommes.