De quoi peuvent bien parler ce vieil homme, l'air sérieux et le geste expressif, et cette jeune femme, qui presse de sa main gauche son sein dénudé et semble tâter du doigt la fraîcheur de l'eau ?
Le premier est vêtu d'un somptueux habit de velours rouge et d'une cape d'or ornée de deux camées. Elle a ôté sa chemise et ses sandales, mais a revêtu un grand manteau bleu violacé.
Est-ce Bethsabée, que le roi David aperçut un soir du haut de la terrasse de son palais tandis qu'elle se baignait ? Ou bien Suzanne, femme d'une grande beauté à qui deux vieillards firent en vain des avances puis l'accusèrent d'adultère ? Il pourrait encore s'agir d'Esther, autre figure féminine de la Bible.
Le vieillard porte la cape d'or à gros boutons qui est l'apanage des doges de Venise. Les armoiries sur l'aiguière et le coffret évoquent peut-être la célébration d'une alliance entre deux influentes familles vénitiennes.
Véronèse a partagé la scène en deux parties contrastées, tout en reliant les espaces par un jeu subtil d'accords colorés et un puissant clair-obscur. Ce tableau, daté d'environ 1575, arriva en France dès le XVIIe siècle et passa rapidement dans les collections royales. Conservé au château de Versailles, il fut agrandi en haut et sur le côté gauche, sans doute pour l'adapter à des boiseries. En 1991 a été fait le choix de retrouver le format initial, tout en gardant l'agrandissement derrière le cadre actuel.