Étoffe de fond en velours bleu foncé, uni, d'une seule pièce. Chaîne de fond et de poil en soie, trame en soie. Elle a été fabriquée sur un métier pour velours à bras. Frange en passementerie de soie rouge et or, fabriquée sur un métier de passementerie. L'étoffe et la frange ont été fabriquées à Valence. Décor brodé sur une base en toile de lin posée sur un cadre à broder et appliqué par la suite sur l'étoffe de velours. Les broderies sont en soies polychromes à point nuancé, de figures, point de fausse chaînette, cordonnet et point noué. Celles en or et argent sont exécutées au point lancé, au point de cordonnet, et en dessin en échiquier sur rembourrage. Les paillettes sont appliquées. Une petite partie de la décoration est brodée directement sur le velours. Il s'agit certainement du travail d'un atelier de Sant Joan de les Abadesses. Commandé par Joan de Robira, prêtre, et Jaume Tenes. Dans la partie supérieure, il y a une bande avec quatre blasons, ceux des personnes qui ont commandé ce devant d'autel, ils sont groupés deux par deux. Deux sont sur un fond d'argent avec un G qui se prolonge en une croix dans la partie supérieure, c'est le blason de Joan de Robira ; et deux avec des tenailles d'argent sur fond d'or et des fleurs, le blason de Tenes. La bande est bordée dans sa partie inférieure par une frange en fils de soie et d'or. De chaque côté du devant d'autel, on peut voir deux grandes décorations identiques, seule la partie centrale change. Elles sont de forme octogonale avec huit arcs ogivaux. De chaque pointe sort une tige entourée de fleurs et de feuilles de chardon. La décoration qui se trouve à droite du spectateur représente un aigle couronné aux ailes étendues. Son corps est directement brodé sur le velours. Celle de gauche représente, au centre, un Agnus Dei avec le labarum. Il s'agit des symboles de saint Jean l'Évangéliste et de saint Jean - Baptiste respectivement, vocation logique si l'on tient compte du fait que ce devant d'autel a été réalisé pour le monastère de Sant Joan de les Abadesses. Au centre, on reconnaît la scène de l'Épiphanie, représentée avec un sens poussé du pictural. Elle a été brodée puis appliquée sur le velours. Le socle est recouvert d'herbe et fermé à l'arrière par la barrière d'une étable. Quatre poteaux soutenant une toiture évoquent une crèche. La Vierge se trouve au centre de la composition, assise devant la barrière, la tête couverte d'un voile blanc, elle porte une tunique et un manteau dont les plis s'étendent sur le sol. Elle tient l'Enfant Jésus sur ses genoux, il fait le geste de bénir avec sa main droite. Il s'agit d'un enfant beaucoup plus grand qu'un nouveau né, c'est une des façons de le représenter dans une Épiphanie. Saint Joseph se tient debout derrière Marie, une baguette fleurie à la main. Derrière la barrière apparaissent les têtes du boeuf et de l'âne. On voit aussi un personnage vêtu à la mode de l'époque qui tient à la main une coupe en or. Il s'agit de l'une des sages-femmes dont parlent les évangiles apocryphes. Elles ont aidé la Vierge lors de son accouchement. Elles faisaient aussi office de notaires de la naissance du Christ. Sur le côté gauche de la composition, on voit les trois rois mages. Melchior avec les cheveux et la barbe blanche, agenouillé, il a déjà offert sa coupe avec de l'or, c'est la sage-femme qui la tient, il va baiser les pieds de Jésus. Plus à l'extrême gauche, Gaspar et Balthasar, debout, portent leurs offrandes à la main. Le premier, blond et barbu, montre de la main l'étoile qui se trouve au-dessus de la toiture de la crèche. Balthasar, qui a la peau blanche et est imberbe, regarde l'étoile. La couleur de peau noire du troisième roi n'était pas encore entrée dans l'iconographie des rois mages. Tous trois sont vêtus à la mode des nobles de la seconde moitié du XVe siècle, ce qui offre un bon exemple des vêtements que l'on portait à la cour à l'époque. La broderie de la partie centrale du devant d'autel, faite en peinture à l'aiguille de style flamand, est l'une des meilleures broderies conservées de Catalogne. La perfection et le raffinement en sont particulièrement poussés. On ne voit plus, actuellement, la broderie des visages de Jésus, de Marie et de saint Joseph. Le carton est un exemple parfait du style de Jaume Huguet bien qu'aucun document ne crédite qu'il en soit l'auteur. Il peut avoir été réalisé par un peintre de son cercle ou par l'un de ses disciples.
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