Napoléon Bonaparte devient empereur des Français par le senatus-consulte du 18 mai 1804. La fastueuse cérémonie du sacre est organisée quelques mois plus tard, le 2 décembre 1804, à Notre-Dame de Paris. À cette occasion, Napoléon revêt plusieurs costumes, dont le grand habillement, porté lors du couronnement. C'est dans ce costume, composé entre autres d'un manteau de velours pourpre semé d'abeilles d'or, que le peintre Jean-Auguste-Dominique Ingres le représente en 1806.
Napoléon porte sur son manteau l'abeille, qui est, avec l'aigle, l'un des emblèmes choisis pour l'Empire. Sur sa tête, la couronne de laurier rappelle, comme la pourpre, les empereurs de la Rome antique. On note aussi la présence de certains « regalia » (objets de pouvoir transmis lors du sacre, déjà portés par les rois de France) : le sceptre sommé d'une statuette de Charlemagne, la main de Justice (à droite) et une épée inspirée de Joyeuse, épée légendaire de Charlemagne. Les motifs du tapis reprennent les signes du zodiaque traditionnellement associés à la figure de Jupiter ainsi que la silhouette de la « Vierge à la chaise » de Raphaël.
Ce portrait, l'un des plus célèbres de Napoléon aujourd'hui, est cependant mal accepté par ses contemporains qui le jugent « gothique » et « barbare » lors de son exposition au Salon de 1806. L'originalité de la composition, de face, assis, la tête émergeant d'un corps noyé dans un imposant costume, s'éloigne en effet des représentations habituelles de l'Empereur, qui se rapproche ici d'un Jupiter olympien ou d'une icône byzantine et donne l'impression d'un visage hyperréaliste flottant sur un corps abstrait.