Cette marionnette à gaine fait partie d’un ensemble qui jouait la Tentation de saint Antoine au Théâtre du Vrai Guignolet, dans le jardin des Champs-Elysées à Paris. La Tentation est une pièce très populaire dont on connaît plusieurs versions mais qui suit toujours la même trame : le saint, par son humilité et les conversions qu’il opère, provoque la colère du roi de l’enfer. Celui-ci essaie donc de corrompre le vieil homme par diverses tentations, à commencer par la luxure, offerte par la reine de l’enfer en personne. Devant la constance inébranlable du saint, Satan finit par envoyer une troupe de démons qui malmènent le vieillard, saccagent son ermitage et mettent le feu à la queue de son cochon. Mais la patience de saint Antoine émeut le Bon Dieu, qui envoie ses anges mettre fin à ses tourments.
Cette pièce était jouée dans les théâtres de marionnettes depuis le XIXe siècle, à côté du Chat Botté et du Petit Chaperon rouge. Elle s’inscrit dans une très longue tradition, puisqu’elle reprend l’histoire de l’ermite Antoine écrite au IVe siècle. Le spectacle avait un but moralisateur hérité de la légende chrétienne d’origine : l’endurance et la continence face aux tentations qui détournent de Dieu sont toujours récompensées. Mais elle ajoute beaucoup de détails puisés dans les traditions populaires relatives à saint Antoine, le tout dans une atmosphère rocambolesque et pétaradante (des pétards étaient parfois accrochés à la queue d’un véritable porcelet pendant la pièce) proche de l’ambiance des pitreries du carnaval. Saint Antoine et ses péripéties occupent en effet une place importante dans de nombreux carnavals, où il symbolise la victoire sur l’hiver, la mort et les démons.