Les carnets de voyage au Maroc de Delacroix

Embarquez avec Eugène Delacroix pour son premier voyage en Orient.

Carnet ouvert au Folio 27, Etude de femme juive (1832), Eugène DelacroixChâteau de Chantilly

Le 10 janvier 1832 le peintre Eugène Delacroix embarque pour un voyage de six mois qui bouleversera à jamais sa vie et sa peinture.    
 
Il accompagne le comte Charles de Mornay, jeune diplomate chargé par le roi Louis-Philippe d’une mission diplomatique au Maroc auprès du sultan Moulay Abd er-Rahman. 

Cet unique voyage en Orient est pour Delacroix un véritable choc esthétique.  

Curieux de tout, il va accumuler dans des carnets notes et dessins, qui vont constituer une sorte de répertoire iconographique, dans lequel il puisera pour composer ses peintures orientalistes jusqu’à la fin de sa vie.  

A la vente posthume de l’atelier de l’artiste, c’est le peintre Adrien Dauzats qui acheta ce carnet pour le compte d’Henri d’Orléans duc d’Aumale, dernier propriétaire du château de Chantilly.  

Folio 7, Femme à la jupe rouge (1832), Eugène DelacroixChâteau de Chantilly

Delacroix écrira un livre de souvenirs sur son voyage : Souvenir d’un voyage dans le Maroc, manuscrit inachevé, dans lequel l’artiste plonge dans ses souvenirs et bien sûr dans ses carnets, pour recomposer le récit de son voyage.   

Folio 7, Femme à la jupe rouge (1832), Eugène DelacroixChâteau de Chantilly

A plusieurs reprises il évoque la beauté de femmes juives et s’attarde avec minutie sur leur costume.   

Vêtements, parures, chevelure, tout retient l’attention de l’artiste fasciné par leur beauté : « Les juives sont admirables. Je crains qu’il ne soit difficile d’en faire autre chose que de les peindre : ce sont des perles d’Eden. »   

Folio 11, Costume de femme juive de Tanger (1832), Eugène DelacroixChâteau de Chantilly

La complexité du costume intrigue Delacroix qui réalise de nombreuses études détaillées.  
Voici ce qu’il en écrit : « Ces femmes sont à la fois belles et jolies et leurs habits ont une certaine dignité qui n’exclut ni la grâce ni la coquetterie. ».    

  

Folio 15, Jeune femme avec de grosses boucles d'oreille (1832), Eugène DelacroixChâteau de Chantilly

Delacroix fait également une description très précise des bijoux : « Des boucles d’oreilles énormes et surchargées de pierres non taillées à la manière des bijoux gothiques ou byzantins encadrent ces jolis visages. »  

Folio 19, Femme portant le Haik (1832), Eugène DelacroixChâteau de Chantilly

Dans le carnet de Chantilly rares sont les représentations masculines.

Cette tête de « l’homme qui voulait un violon » est aussi mystérieuse par sa présence que par l’annotation qui l’accompagne.

Delacroix poursuit son étude du costume en représentant ici une femme drapée dans un haïk. Chaque région du Maghreb a sa façon de le porter, Delacroix a choisi la mode de Tripoli.  

Folio 25, Détail d'un costume vu de dos (1832), Eugène DelacroixChâteau de Chantilly

L’artiste n’a pas toujours le temps de colorier son dessin, mais reste soucieux de garder tous les détails et les spécificités des vêtements.  

Il n’oublie pas les annotations de couleurs ou de tissus: « blanc », « rouge », « velours vert », « vert clair ».  

 

Folio 27, Etude de femme juive (1832), Eugène DelacroixChâteau de Chantilly

Il s’agit sans doute ici de Precidia Ben Chimol, la fille d’Abraham Ben Chimol, l’interprète du consulat de France à Tanger qui accompagnait la délégation.

C’est grâce à lui que Delacroix va pénétrer la communauté juive de Tanger et découvrir leur quotidien.  

Folio 29, Tête féminine avec voile et turban (1832), Eugène DelacroixChâteau de Chantilly

Très belle étude au crayon d’une jeune femme portant une coiffe monumentale, sans doute de cérémonie.  

Folio 31, Femme assise au voile quadrillé (1832), Eugène DelacroixChâteau de Chantilly

Delacroix poursuit son étude du costume féminin, et plus particulièrement de la parure: divers colliers, bagues et toujours ces boucles d’oreille impressionnantes qui encadrent un visage menu.  

Folio 37, Croquis d'Arabes (1832), Eugène DelacroixChâteau de Chantilly

Dans le carnet de Chantilly les dessins mettant en scène les hommes sont rares et peu détaillés.

Sur cette page, en quelques lignes sinueuses, Delacroix figure une étude d’homme accroupi vu sous différents angles.  

Folio 39, Maison sous les arbres (1832), Eugène DelacroixChâteau de Chantilly

A la date du 23 avril, Delacroix était à Tanger. Il s’y est beaucoup promené, voici ce qu’il écrit à son ami Pierret :  
« Je fais des promenades à cheval aux environs qui me font un plaisir infini, et j’ai des moments de paresse délicieuse dans un jardin aux portes de la ville, sous des profusions d’orangers en fleur et couverts de fruits (…). »        

Folio 39, Maison sous les arbres (1832), Eugène DelacroixChâteau de Chantilly

Folio 41, Paysage avec les murailles de Tanger (1832), Eugène DelacroixChâteau de Chantilly

En balade dans les collines des environs de Tanger, Delacroix a pris de la hauteur pour saisir toutes les nuances de la végétation.  

L’aquarelle est la technique des peintres voyageurs, elle nécessite un matériel peu encombrant et sèche très rapidement ce qui exige une exécution rapide, et une main bien exercée.  

Folio 45, Entrée d'une maison arabe (1832), Eugène DelacroixChâteau de Chantilly

Delacroix étudie aussi l’architecture et rend compte dans ses carnets des maisons arabes. 
 
Du Maroc et d’Alger il va rapporter des études qui seront réutilisées par la suite dans certains de ses tableaux dont les plus célèbres comme La noce juive dans le Maroc ou Femmes D’Alger.  

Folio 48, Cour arabe et escalier (1832), Eugène DelacroixChâteau de Chantilly

Nous savons que grâce à son interprète Abraham Ben Chimol, Delacroix a pu pénétrer dans quelques maisons de Tanger.  

Dans ses dessins l’artiste privilégie souvent les petits détails des éléments d’architecture comme les portes, les fenêtres, les niches, ou le pavement de sol.  

Folio 57, Deux femmes dans une maison (1832), Eugène DelacroixChâteau de Chantilly

Sur cette très belle page aquarellée Delacroix joue sur les contrastes colorés et utilise le blanc du papier pour apporter la lumière dans sa composition.  

Folio 59, Jamila Bouzaglo, portrait et notes (1832), Eugène DelacroixChâteau de Chantilly

Le dimanche 29 avril, Delacroix rend visite à Jacob Bouzaglo, notable juif de Tanger.

Sur cette page il a fait le portrait de sa fille Jamila qui lui a écrit quelques mots en judéo-espagnol :« Monsieur Delacroix, monsieur Mornay, monsieur Frayssinet, monsieur Marcussen ont eu la bonté de me rendre visite, dimanche 29 avril. Jamila Bouzaglo. »  

Folio 61, Portrait de Jamila Bouzaglo (1832), Eugène DelacroixChâteau de Chantilly

Dans ce très beau portrait de Jamila Bouzaglo, Delacroix s’attarde sur le visage de la jeune femme.  

Au crayon, l’artiste révèle toutes les subtilités du visage et s’attarde sur l’épaisse chevelure noire et le regard profond.  

Le regard des femmes marocaines qu’il décrit si joliment :

« Tout le monde connaît le charme de ses yeux orientaux dont l’éclat s’augmente de cette ligne noire due à l’emploi du khôl (…).  Cette invention donne à l’œil un attrait tout particulier, je ne sais quoi de léonin et d’un peu farouche qui anime ces petites mines douces et régulières. »  

Folio 63, Femmes Juives (1832), Eugène DelacroixChâteau de Chantilly

Cette très belle aquarelle représente un intérieur que Delacroix a pris le temps de détailler.

Delacroix ne cherche pas le pittoresque de bazar, il est dans le réel, sans artifices, il nous invite à partager ce moment d’intimité.  

Folio 81, Femme à la jupe bleue (1832), Eugène DelacroixChâteau de Chantilly

Belle étude de femme juive, où l’on remarque une inscription de l’artiste : « sol / solica ».  

Ce nom rappelle celui d’une jeune martyre juive de Tanger, qui parce qu’elle refusa de se convertir à l’Islam fut décapitée à Fès en 1834, soit deux ans après le voyage au Maroc.  

Il est possible que Delacroix ait rencontré la jeune femme à Tanger, à moins que cette annotation soit postérieure au dessin, et marque son intention de réaliser une peinture sur l’histoire de cette femme en utilisant cette aquarelle. 

Folio 83, Les murailles de Tanger (1832), Eugène DelacroixChâteau de Chantilly

L’album de Chantilly couvre les trois derniers mois du voyage, période dense en déplacements: Tanger, Cadix, Séville, puis Oran et Alger. Cette vue de Tanger, a été réalisée du bateau La Perle qui s’apprêtait à quitter le Maroc pour un court séjour en Andalousie.  

Folio 87, Vue de Cadix de la rade (1832), Eugène DelacroixChâteau de Chantilly

Avant d’accoster en Andalousie, en mai 1832, le navire doit observer une quarantaine dans la rade de Cadix à cause d’une épidémie de choléra qui sévissait alors en Europe. 

Folio 87, Vue de Cadix de la rade (1832), Eugène DelacroixChâteau de Chantilly

Delacroix trompe son ennui en dessinant les navires. Il accostera enfin le lendemain, mercredi 16 mai, on peut lire dans son Journal : «(…) obtenu l’entrée à Cadix. Joie extrême. ».  

Folio 91, Paysage aux aloès et cactus (1832), Eugène DelacroixChâteau de Chantilly

Delacroix joue merveilleusement avec la transparence de l’aquarelle.

On retrouve dans ce dessin le motif de l’aloès, plante typique d’Afrique du Nord, dont il apprécie l’aspect graphique des longues feuilles sombres et aiguisées.  

Folio 95, Cavallier dans les collines (1832), Eugène DelacroixChâteau de Chantilly

Dernière aquarelle du carnet, Delacroix arrive presque à la fin de son voyage.

Cette aquarelle, à la composition minimaliste, est comme un dernier regard porté sur le paysage marocain où il ne garde que l’essentiel : la lumière.

Crédits : tous les supports
Il peut arriver que l'histoire présentée ait été créée par un tiers indépendant et qu'elle ne reflète pas toujours la ligne directrice des institutions, répertoriées ci-dessous, qui ont fourni le contenu.
Accueil
Découvrir
Jouer
À proximité
Favoris