Gustav Klimt et le symbolisme (3e partie)

Œuvres fantastiques, et références littéraires et symboliques

Friends (Water serpants) (1904/1907), Gustav KlimtBelvedere

Œuvres fantastiques

Gustav Klimt a fait preuve d'une ingéniosité exceptionnelle pour mettre en valeur la sensualité de ses modèles féminins nus. Parmi ses créations les plus originales, on trouve des représentations de fées aquatiques, qu'il décrit comme des "sirènes" ou des "serpents d'eau". Ce sont des figures passives, rêveuses, absorbées par elles-mêmes, aux mouvements fluides et flottants.

L'œuvre "Serpents d'eau I", que Gustav Klimt a réalisée en 1904 sur un parchemin petit format, en est un exemple éloquent. Deux figures féminines plutôt élancées se blottissent tendrement l'une contre l'autre, entourées de nombreuses décorations biomorphiques inspirées du monde animal et végétal.

Gustav Klimt's Painting "Water snakes II" (1906/1907) (1908), Moriz NährAustrian National Library

Le peintre a repris le même sujet dans une œuvre grand format, intitulée "Serpents d'eau II". Dans cette toile, des femmes nues au regard onirique nagent devant le spectateur. Comme par enchantement, leurs longs cheveux roux de nymphes sont constellés de fleurs aux couleurs chatoyantes.

Reclining Woman (Study for "Water Snakes II", first version) (1904), Gustav KlimtAlbertina Museum

En préparation à ce tableau, Gustav Klimt a exécuté un grand nombre d'études de nus. Il était en effet obsédé par sa volonté de capturer l'essence de ces femmes sur papier.

Reclining Woman (Study for "Water Snakes II", first version) (1904), Gustav KlimtAlbertina Museum

Au fil des années, le peintre a produit de nombreux dessins pouvant être associés aux figures féminines qui habitent les deux variantes de "Serpents d'eau". Ces croquis montrent par ailleurs que Klimt était capable de travailler sur un même thème pendant de longues périodes.

Woman Reclining with Right Leg Raised (1904), Gustav KlimtAlbertina Museum

Dans nombre d'entre eux, ses modèles posent nus et allongés, et sont souvent représentés endormis. Gustav Klimt a reproduit exactement les mêmes poses dans les deux versions de "Serpents d'eau", dans lesquels les corps donnent l'impression de flotter dans l'eau.

Silver Fish (Nymphs) (c. 1899), Gustav KlimtAlbertina Museum

Ses représentations de nymphes et de fées aquatiques reflètent le goût des artistes symbolistes pour le monde secret des profondeurs. Dans le domaine des arts décoratifs, et plus particulièrement dans celui de la verrerie, nombreux sont les artistes ayant tenté d'imiter la magie de la fluorescence sous-marine. Gustav Klimt a lui aussi cherché à mettre en lumière le mystère de ce monde multicolore à travers ses figures sous-marines.

Il y est d'ailleurs magistralement parvenu dans son tableau "Les sirènes" (1902-1903), dans lequel il reproduit l'étrange lumière phosphorescente émise par certains organismes des profondeurs marines. Pour ce faire, il a appliqué des feuilles d'or et d'argent afin de créer un effet de scintillement. Il a ainsi donné naissance à une œuvre d'art unique de facture artisanale.

Goldfish (1901/1902), Gustav KlimtSource d'origine : Kunstmuseum Solothurn, Dübi-Müller-Stiftung

Dans un tableau antérieur, intitulé "Le poisson rouge", Gustav Klimt a utilisé le même procédé pour représenter les écailles dorées d'un grand poisson nageant vers une femme nue.

Avec une soif de provocation stupéfiante, Gustav Klimt illustre l'attraction érotique exercée par une femme nue, vue de dos, qui tourne la tête pour lancer un sourire espiègle au spectateur. Le regard de cette figure a été interprété par ses contemporains comme un clin d'œil ironique à ses détracteurs.

Gustav Klimt (1908), Atelier Madame d'OraAustrian National Library

Références littéraires et symboliques

Parmi les motifs symbolistes que Gustav Klimt a employés dans ses œuvres, plusieurs font référence à des thèmes abordés dans d'autres œuvres. Pour la frise Beethoven, l'artiste viennois s'est inspiré des images suggérées par Richard Wagner dans son interprétation de la Symphonie n° 9 de Ludwig van Beethoven. Dans d'autres cas, Gustav Klimt a revisité des thèmes classiques de l'histoire de l'art en les plaçant dans un nouveau contexte sans fournir d'autres explications, de sorte que le sens de l'œuvre reste une énigme. Il n'en reste pas moins que Gustav Klimt était un excellent narrateur, qui inventait sans cesse de nouvelles idées à partir de thèmes connus.

Nuda Veritas after Gustav Klimt, plate 5, The work of Gustav Klimt (1918)MAK – Museum of Applied Arts

Le tableau "Nuda Veritas", qu'il a réalisé en 1899, est une œuvre résolument programmatique. Gustav Klimt a mis la citation suivante de Friedrich Schiller bien en vue sur un fond doré dans la partie supérieure de la toile pour en faire un élément important de sa composition : "Si tu ne peux plaire à tous par tes actes et ton art, plais à peu. Plaire à beaucoup est mal." De même, le titre de l'œuvre, "Nuda Veritas", est inscrit sur un fond doré en bas du tableau. Gustav Klimt a pris le titre dans son sens littéral en associant la nudité à la vérité. C'est pourquoi il a peint sans ambages une femme entièrement nue, qui se tient debout, faisant face au spectateur.

Dans "Nuda Veritas", l'artiste adopte un réalisme remarquable, jusqu'à reproduire les poils du pubis, chose qu'aucun peintre n'avait osée jusqu'alors. Il n'est donc pas surprenant que le tableau ait fait sensation quand il a été présenté pour la première fois.

Pallas Athene (1898), Gustav KlimtWien Museum

Peu avant de créer cette toile, Gustav Klimt a peint une figure de femme nue similaire dans l'œuvre "Pallas Athéna" (1898). On y voit la déesse grecque tenir dans sa main une statue miniature de Niké, déesse de la victoire, nue et debout sur une sphère.

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Aucune autre œuvre de Gustav Klimt n'a sans doute un caractère aussi programmatique que la célèbre frise Beethoven, réalisée pour la 14e exposition de la Sécession, en l'honneur du compositeur allemand.

The Beethoven Frieze (1901), Gustav KlimtSecession

Les thèmes et les motifs principaux de la frise font référence à un texte sur la Symphonie n° 9 de Beethoven que Richard Wagner a écrit en 1846, mais qui ne fut publié qu'en 1871. Alfred Roller, ami et collègue de Gustav Klimt, et peintre-décorateur à l'opéra d'État de Vienne, lui aurait fait connaître ce texte. Pour Richard Wagner, cette symphonie suit les mouvements d'une âme joyeuse, qui doit se défendre contre des forces hostiles, idée qu'il voit mise en musique dès la première strophe.

Le chevalier d'or de la frise Beethoven, un chevalier prêt pour la bataille qui renvoie aux idées du philosophe Friedrich Nietzsche opposant l'homme aux "forces hostiles", incarne une vision dualiste du monde, où s'opposent le bien et le mal.

L'un des autres thèmes centraux de la frise, qui renvoie surtout au dernier mouvement de la Symphonie n° 9, est l'idée du salut de l'humanité, que Gustav Klimt met en scène dans la toile "Chœur des anges du Paradis".

Life is a Struggle (Golden Rider) (1903), Gustav KlimtAichi Prefectural Museum of Art

Plusieurs œuvres symboliques du peintre viennois revêtent un caractère programmatique, partant d'un thème classique de l'histoire de l'art. Son tableau "La vie est une lutte (Le chevalier d'or)" de 1903 en est un bel exemple.

Cette peinture à l'huile représente un homme à cheval, qui rappelle les statues équestres de la Renaissance à Venise et à Florence. Gustav Klimt a en effet eu l'occasion de visiter ces deux villes et de s'émerveiller devant leurs monuments lors de deux voyages qu'il a effectués en Italie la même année où il a réalisé cette œuvre. Portant une armure complète, un casque et une lance, le chevalier d'or avance sur un chemin doré avec une détermination inébranlable.

Cependant, son destin est sur le point de prendre un tournant tragique. Dans le coin inférieur gauche, un serpent perfide fait son apparition. Il s'apprête à mordre le pied du cheval, qui provoquera sa chute ainsi que celle de son cavalier. Par le biais de cette œuvre, Klimt souligne de façon subtile le caractère fragile et éphémère de la force et de la puissance.

Adam and Eve (1916/1917), Gustav KlimtBelvedere

Œuvre datant de la dernière année de création de Gustav Klimt, "Adam et Ève" s'inscrit dans une longue tradition d'iconographie biblique. Toutefois, elle revêt un caractère symbolique qui va bien plus loin que les représentations traditionnelles du mythe d'Adam et Ève dans le cadre religieux.

Fait remarquable, le serpent qui a séduit Ève ne figure pas dans le tableau. On voit cependant cette dernière tenir dans la main le fruit défendu. Ici, toute interprétation n'est qu'une hypothèse, puisque la mort soudaine de Gustav Klimt a empêché le peintre d'achever le tableau.

En choisissant la figure d'Ève, Gustav Klimt a manifestement livré une interprétation allégorique symbolique de la femme comme source de vie. Ève se tient en effet au centre de la composition, dominant l'ensemble du tableau, tandis qu'Adam, presque entièrement caché derrière elle, semble plongé dans un sommeil divin, ce qui correspond au récit biblique de la naissance d'Ève.

Crédits : histoire

Text: Österreichische Galerie Belvedere / Franz Smola

© Österreichische Galerie Belvedere

www.belvedere.at

Crédits : tous les supports
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