La Louma

La Louma, grue légère conçue par Alain Masseron et Jean-Marie Lavalou dans les années 70, concrétise le rêve de tout cinéaste.

Une Louma version 7m50, Provenant de la collection : La Cinémathèque française
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La caméra, libérée de ses contraintes terrestres, se meut dans l’espace avec fluidité, peut monter très haut ou descendre très bas, obéissant au millimètre pour se jouer des obstacles, tel un oiseau mécanique commandé à distance. On sépare physiquement la caméra de l’opérateur qui reste à terre ; mais chacun y gagne en souplesse et en liberté de mouvement. “On avait envie d’être un peu plus légers, et surtout on voulait tourner en décors naturels, et les machines de l’époque ne nous permettaient pas de le faire” explique Alain Masseron.

Facilement démontable, la Louma (contraction de Lavalou et Masseron) est constituée de quatre éléments fondamentaux : la caméra avec une tête permettant des panoramiques horizontaux et verticaux ainsi qu’une rotation autour de l’axe optique ; le bras, modulaire dans sa première version puis télescopique sur la Louma 2 ; le support qui peut se monter sur une Dolly ou sur rails ; et les contrepoids. Les opérateurs contrôlent le cadre, la focale, le point, les mouvements, à partir d’une tête à manche déportée, ou d’une régie vidéo dotée de manivelles.

Une Louma éclatée en sous-éléments, Provenant de la collection : La Cinémathèque française
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La version primitive est conçue en octobre 1970 par Masseron et Lavalou au sein de l’Établissement cinématographique et photographique des armées. Masseron revient sur les premiers balbutiements du système : “Le bébé est né à partir de bricolages sur divers courts métrages en 35 mm avec un Caméflex, et c’est sur un tournage réalisé par Michel Picard dans un sous marin que nous nous sommes amusés à faire tout le film en plusieurs plans séquences, ce qui aurait été impossible à faire sans notre invention”. Leur appareil permet une première réalisation à l’aveugle, sans visée vidéo, d’un plan qui fait sensation : à l’intérieur étroit du sous-marin, dans une salle d’environ 8 mètres de longueur, la caméra passe au-dessus d’une table où les matelots sont installés, s’avance avec fluidité et stabilité, opère un 360 degrés et finit par explorer tout l’espace, malgré l’exiguïté du lieu. “Personne ne comprenait comment le plan avait été fait. Certaines revues professionnelles on même avancé l’idée que c’était peut-être un caméraman nain qui marchait sur la table avec la caméra” confie encore Masseron.

Photographie de tournage de "Moyens de veille et d’attaque du sous-marin", 1971, Provenant de la collection : La Cinémathèque française
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Premiers essais de Louma, extrait du film de Michel Picard, Provenant de la collection : La Cinémathèque française
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Albert Viguier, loueur de matériel (Alga-Samcine), est séduit par le concept. Il recommande alors les deux jeunes inventeurs au fabricant et distributeur britannique David Samuelson qui apporte, de Londres, son soutien financier. Le modèle est amélioré, et en 1972, une Louma très aboutie est présentée à la presse. Le tournage du film de René Clément, La Course du lièvre à travers les champs, sert même de test pour une première utilisation en situation. En 1974, un modèle avec tête motorisée et télécommandée est conçu. En 1975, le premier prototype est achevé. Roman Polanski, accompagné du chef opérateur Sven Nykvist et du décorateur Pierre Guffroy, l’adopte dès 1976 pour les plans séquences d’ouverture et de clôture du Locataire. Sept exemplaires sont fabriqués et se retrouvent à Paris, Londres, New York, Hollywood mais également en Australie, à Sydney.

Photographie de tournage du Locataire (Roman Polanski, 1976), 1976, Provenant de la collection : La Cinémathèque française
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Steven Spielberg entend parler de ce procédé révolutionnaire, mais le rendez-vous fixé à Paris pour lui présenter l’appareil ne peut avoir lieu. Pugnaces, Lavalou et Masseron lui feront la démonstration dans le jardin de son hôtel au festival de Deauville, où il présente Rencontres du troisième type. Spielberg teste l’appareil, et, immédiatement séduit, décide d’emmener une Louma aux États-Unis pour tourner 1941. Lavalou l’accompagne en Californie pour le tournage, en 1979. “This is my new toy !” proclame le réalisateur, enthousiaste, qui la réutilisera notamment pour Indiana Jones. La Louma a conquis Hollywood.

Par la suite, la Louma va connaître de nombreuses améliorations : colonne hydraulique télescopique (1990), système Backpan (compensation automatique du panoramique horizontal de la tête caméra lors du pivotement du bras, 1993), version télescopique (Louma 2, 2006), assistance informatique en temps réel (2007), Previs-on-set (prévisualisation, 2010), etc. Masseron et Lavalou sont aidés par Guy Tournerie, Hervé Theys (concepteur de la partie électronique) et Nicolas Pollacchi qui contribuent grandement au succès du dispositif.

En 2001, Lavalou et Masseron reprennent, avec Nicolas Pollacchi, l’activité de location du matériel (Loumasystems) et développent de nouveaux procédés. En 2005, Jean-Marie Lavalou, Alain Masseron et David Samuelson reçoivent un Oscar pour la conception et le développement de la grue Louma et de son système télécommandé, qui ont ouvert de nouvelles possibilités en matière d’écriture cinématographique.

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