Raffaello Sanzio, mieux connu sous le nom de Raphaël, est l’un des artistes les plus illustres de la Renaissance italienne (XVIe siècle).

Le musée Condé vous invite à découvrir son extraordinaire collection de dessins et de tableaux du maître, en parcourant sa carrière, de ses premières esquisses religieuses à ses chefs-d’œuvre majeurs, pour aboutir aux productions de ses élèves.

Madone d’humilité, couronnée par deux anges volant et entourée par six autres anges (1483-1520), RaphaëlChâteau de Chantilly

Qui est Raphaël ?

Fils de l’artiste Giovanni Santi (vers 1440/45-1494), Raphaël est né en 1483 à Urbino, un centre florissant d’arts et d’humanisme en Italie centrale. 

Étude pour la Dispute du Saint Sacrement : vingt clercs et ecclésiastiques discutant (1483-1520), RaphaëlChâteau de Chantilly

Stimulé par cet environnement et formé par son père, le talentueux jeune homme est vite remarqué, notamment à travers ses dessins. 

Il devint tôt le collaborateur du Pérugin, un peintre à succès connu pour la rigueur de ses représentations religieuses, dans la région italienne de l’Ombrie.

La Madone de la maison d'Orléans (Avant 1507), RaphaëlChâteau de Chantilly

À l’âge de 21 ans, Raphaël part à Florence, où il côtoie Léonard de Vinci ou encore Michel-Ange. 
Il est marqué par leur sens du dynamisme et de la composition. Ses propres œuvres prennent alors vie et gagnent en expressivité.  

Appelé dans la Rome des papes pour décorer à fresque le palais du Vatican, il s’impose alors rapidement comme un des plus grands maîtres de la Renaissance.

Célébré de son vivant même, il meurt à 37 ans, au terme d’une carrière courte mais fulgurante.

Le duc d'Aumale et Cuvillier-Fleury dans le cabinet des livres (1880), Gabriel FerrierChâteau de Chantilly

Chantilly, sanctuaire de Raphaël

Si le musée Condé de Chantilly abrite la collection la plus importante d’œuvres de Raphaël en France, après le musée du Louvre, c’est grâce à son fondateur, Henri d’Orléans, duc d’Aumale (1822-1897).

En effet, Raphaël est le peintre favori du duc et le plus cité dans ses agendas personnels. Il dépensa sans compter pour acquérir les chefs-d’œuvre de sa main qui passaient en vente au XIXe siècle.

Buste d'homme (1500-1503), Pietro VannucciChâteau de Chantilly

Le mentor de Raphaël

L’art du Pérugin, le mentor de Raphaël, est reconnaissable par ses dessins épurés, linéaires et maîtrisés. 

Cette feuille est issue du carnet de copie d’un élève du Pérugin, réunissant des modèles d’après le maître. 

Ce buste de vieillard barbu reprend celui figurant sur un tableau d’autel commandé au Pérugin (Le Mariage de la Vierge, musée des beaux-arts de Caen), qu’on sait avoir été une source d’inspiration pour le jeune Raphaël. 

Saint Sébastien (1445-1523), Pietro VannucciChâteau de Chantilly

Ce dessin de saint Sébastien d’après une fresque de Pérugin à Panicale, en Italie centrale, montre un le saint, doté d’une imposante musculature, implorant sereinement le ciel.

Le sujet est en contrapposto, c’est-à-dire qu’une de ses jambes est légèrement fléchie, conférant une impression de dynamisme et de mouvement    

Les fresques du Pérugin et ses dessins ont beaucoup influencé Raphaël. 

Deux enfants debout, un enfant assis (1454-1513), Bernardino PinturicchioChâteau de Chantilly

L'influence de Pinturicchio

Artiste prisé à Rome, où il collabore au chantier de la chapelle Sixtine aux côtés du Pérugin, Pinturicchio développe un style plus fantaisiste et un talent pour la narration.

Il représente ici des enfants semblant tenir les rênes d’un char sur lequel serait assis l’un d’entre eux. Pinturicchio et ses enfants dodus inspirent également Raphaël.

Deux enfants nus montés sur des sangliers et jouant à la lance en présence de six autres enfants nus (1483-1520), RaphaëlChâteau de Chantilly

Les premiers dessins de Raphaël

Dans ce dessin réalisé vers 1502-1504, le jeune Raphaël affirme déjà une ligne claire et maîtrisée, héritée de Pérugin. 

Mais il confère également à sa composition un véritable dynamisme. 

Cette œuvre témoigne aussi des échanges artistes qui ont cours pendant la Renaissance : pour représenter les sangliers sur lesquels sont juchés des enfants pleins de vie, Raphaël s’inspire d’une gravure du maître allemand Albrecht Dürer. 

A leurs ventres bombés, leurs mentons en galoche, leurs hauts fronts et leurs cheveux bouclés, les enfants sont semblables à ceux de Pinturicchio ou du Pérugin.

Ce dessin est un carton, c’est-à-dire un support utilisé dans la préparation d’une autre œuvre, comme une fresque ou un tableau, à travers une technique de report (via les petits trous).

Jeune moine vu de face, à micorps, la tête légèrement inclinée, lisant un livre (1483-1520), RaphaëlChâteau de Chantilly

Il s’agit ici aussi d’un carton piqué pour le report, dont l’œuvre finale est inconnue. 

 On y voit une représentation d’un homme tenant délicatement un livre entre ses mains qui paraissent presque disproportionnées. 

On reconnait à sa tonsure (son crâne rasé) qu’il s’agit d’un moine, concentré sur sa lecture. 

La sérénité et la monumentalité qui s’en dégagent démontrent toute la force de suggestion du jeune Raphaël. 

Les Trois Grâces (1503/1508), RaphaëlChâteau de Chantilly

Les Trois Grâces

Les Trois Grâces, l’un des tableaux les plus renommés de Chantilly, est aussi l’un des plus petits de Raphaël. 

C’est surtout l’une des premières œuvres profanes qu’il ait peintes.

Le sujet exact de cette œuvre fait débat mais est traditionnellement lue comme une représentation des trois Grâces : Aglaé (la Brillante), Thalis (l’Abondante), Euphrosyne (la Joyeuse), incarnant notamment ici l’amour, la beauté et la pudeur, des qualités féminines.

 Ce groupe s’inspire d’une sculpture antique. 

Des analyses ont révélé un dessin sous la peinture, où se distingue un important changement de composition : une seule des Grâces, celle de gauche, tenait à l’origine une pomme d’or. 

C’est sans doute dans un souci d’équilibre, pour parvenir à la parfaite harmonie finale, que Raphaël opta pour les trois pommes d’or.    

Quatre hommes nus, l’un à demi agenouillé, deux autres debout au premier plan et le quatrième à l’arrière-plan portant un bouclier, plume et encre brune (1483-1521), D'après RaphaëlChâteau de Chantilly

C’est en arrivant à Florence que Raphaël explore la représentation du nu d’après un modèle vivant.

Le présent dessin montrant quatre hommes dénudés en est le témoignage, et illustre l’intérêt particulier de Raphaël pour l’anatomie, que ce soit d’après un modèle vivant ou bien la sculpture antique. 

Tête d’homme de trois quarts, inclinée vers la droite (1483-1520), RaphaëlChâteau de Chantilly

L’expression pathétique de cette tête d’homme est frappante, avec sa bouche grimaçante, son nez déformé et ses grands yeux tombants. 

Ses traits sont sublimés par le travail de la lumière apportée Raphaël par des hachures blanches et une estompe à la pierre noire.    

Ce visage correspond à celle d’un des porteurs du Christ dans Le Retable Baglioni, une œuvre réalisée par Raphaël et inspirée par Le Laocoon, une célèbre statue antique découverte à Rome en 1506, et aussitôt achetée par le pape Jules II.     

C’est notamment le cou sculptural du personnage qui trahit sa filiation avec le groupe sculpté.      

La Vierge assise avec l’Enfant et le petit saint Jean, dans un paysage (1469-1523), RaphaëlChâteau de Chantilly

Les Madones Florentines

Ce dessin est préparatoire au célèbre tableau La Belle Jardinière conservé au Louvre, réalisé par Raphaël vers 1507-1508. 

 On y retrouve la même composition harmonieuse, organisée en pyramide.

Raphaël y montre sa parfaite maîtrise des ombres et des volumes, tout en insufflant une grande tendresse à cette scène maternelle.    

La Madone de la maison d'Orléans (Avant 1507), RaphaëlChâteau de Chantilly

Peinte autour de 1506-1507, au cours de la période florentine de Raphaël, La Madone de la maison d’Orléans étonne par sa simplicité.

Les couleurs primaires disposées avec harmonie contrastent avec l’arrière-plan sombre, où l’on distingue néanmoins des pots sur une étagère, inspirés par la peinture flamande. 

Dans cet intérieur épuré, la Vierge tient tendrement son Fils qui nous adresse un regard d’une grande gravité : nous connaissons avec lui son funeste destin.

Madone d’humilité, couronnée par deux anges volant et entourée par six autres anges (1483-1520), RaphaëlChâteau de Chantilly

Témoin d’un tableau non conservé, connu par deux copies, ce dessin figure une Madone d’humilité, c’est-à-dire une représentation de la Vierge, assise sur le sol, sans trône. 

Elle est entourée d’anges et tient son Fils sur ses genoux.  

C’est à la fin de la période florentine de Raphaël que doit être placée cette œuvre. La position de la Vierge, vue de côté, les jambes déployées, est originale et dynamique, à la différence des Madones frontales que nous venons de voir.

Vierge à l’Enfant avec le petit saint Jean et deux saints (XVIe siècle), Girolamo GengaChâteau de Chantilly

L’influence de Raphael sur ses contemporains

Raphaël a beaucoup inspiré ses contemporains.    

Sur ce dessin de son compatriote Girolamo Genga, on retrouve l’organisation pyramidale des personnages et les jeux de regards échangés observés sur le dessin de Raphaël préparatoire à La Belle Jardinière.    

Femme drapée, agenouillée, vue de trois quarts vers la gauche, la tête levée et les mains jointes ; homme, vu en buste, de trois quarts vers la gauche, le bras droit tendu (1483-1520), RaphaëlChâteau de Chantilly

La fin de sa période Florentine

Ce dessin préparatoire exécuté rapidement atteste de la maîtrise et de l’aisance technique de Raphaël à la fin de sa période florentine. 

Agenouillée et implorant le Ciel, une femme émerge du tracé rapide de quelques traits de plume et d’une intersection de figures inachevées, qui laisse voir la construction géométrique des compositions du maître. 

Malgré l’économie de moyens déployés, on reconnait la grande habileté dans l’expression de souffrance du personnage.

L’esquisse est préparatoire au Retable Baglioni ou Déposition Borghèse (1507).

La Madone de Lorette (1509), RaphaëlChâteau de Chantilly

Raphaël à Rome

La Madone de Lorette est l’une des œuvres les plus fameuses de Raphaël conservées à Chantilly. On y voit la Vierge, dans un magnifique geste maternel à la fois grave et résigné, envelopper de son voile transparent l’Enfant Jésus. 

On peut y voir une symbolisation du linceul, toile mortuaire, qui annonce la mort du Christ.    

Ce tableau est une commande sans doute passée par le pape Jules II et réalisée à Rome, où Raphaël connait l’apogée de sa carrière en travaillant au sein du Vatican.  

Ce tableau était considéré comme une simple copie au temps du duc d’Aumale, jusqu’à ce qu’une étude et une restauration prouvent le contraire à la fin des années 1970. 

En effet, au milieu du XVIe siècle, des auteurs mentionnent un tableau de Raphaël figurant Vierge couvrant l’Enfant de son voile en présence de saint Joseph, montré lors des fêtes solennelles dans l’église Santa Maria del Popolo à Rome.   

Achetés par le cardinal Sfondrato en 1591, le tableau passe ensuite entre les mains du cardinal Scipione Borghese et reçoit, à l’occasion de l’inventaire de 1693, le numéro 133, avant de disparaitre parmi des dizaines de copies.

En 1976, on redécouvre le numéro 133 dans le coin inférieur gauche de l’œuvre ! 
Cette révélation, ajoutée à l’indéniable qualité d’exécution du tableau alors restauré, confirment l’origine exceptionnelle du tableau de Chantilly, acquis par le duc d’Aumale, et son authenticité : il s’agit d’un vrai Raphaël !

Étude pour la Dispute du Saint Sacrement : vingt clercs et ecclésiastiques discutant (1483-1520), RaphaëlChâteau de Chantilly

Cette œuvre est réalisée à Rome, où Raphaël est appelé en 1508 par le pape Jules Il, afin de décorer ses appartements privés au Vatican. Au fil de ses fresques, l’artiste développe un sens du drame et un dynamisme qui l’élèvent au rang de maître. 

Ce dessin de L’Étude pour la Dispute du Saint Sacrement a justement été tracée pour la préparation d’une fresque célèbre de Raphaël au Vatican, située dans la Chambre de la Signature. 

L’énergie contenue qui habite cette œuvre est fascinante : on peut par exemple ressentir le conflit au sein des personnages. De plus, le travail de la lumière est remarquable : c’est un hommage à Léonard de Vinci.

Homme à demi drapé, de trois-quarts vers la droite, portant un fardeau (1514-1517), RaphaëlChâteau de Chantilly

Le dessin et ses élèves

Ce dessin de porteur de pierre exécuté à la sanguine est doté d’une grande précision anatomique et d’une netteté de contour qui confère au personnage une tension physique. 

A cette période, Raphaël est fortement sollicité et doit déléguer l’exécution des fresques à ses assistants ; il en conserve toutefois la conception via ses dessins    

Deux têtes d’apôtres (1514-1515), Atelier bruxellois et RaphaëlChâteau de Chantilly

Commandées en 1515 par le pape Léon X, les tapisseries des Actes des Apôtres furent tissées à Bruxelles sous la direction du marchand-lissier Pieter van Aelst. 

C’est Raphaël qui en conçut les dessins préparatoires, puis, avec son atelier, les cartons à grandeur envoyés à Bruxelles. Ce fragment est issu du second carton, celui de travail, créé à Bruxelles et servant à tisser les tapisseries. 

L’Amour réveillant Psyché (1492-1546), Giulio RomanoChâteau de Chantilly

Giulio Romano entra dans le cercle de Raphaël autour de 1515-1516, au milieu des chantiers du Vatican. Il devint rapidement son premier assistant. 

Ce dessin rappelle particulièrement les compositions animées et pleines d’émotions de son maître. 
Il est préparatoire à un décor du Palais du Tè de Mantoue.  

On voit ici une représentation de Psyché sortant de l’Enfer dont on aperçoit à droite le gardien, Cerbère. 

Après avoir reçu le vase de la beauté de Proserpine et en dépit de la défense qu’on lui avait faite, elle l’ouvre par curiosité et tombe alors dans un sommeil éternel. L’ Amour vint finalement la réveiller d’une de ses flèches. 

Projet de décor mural, à grotesques, et profil d’une porte surmontée d’un trophée (1501-1547), Perino Del VagaChâteau de Chantilly

Raphaël est chargé de superviser et documenter les fouilles archéologiques de Rome. 

A cette occasion, il redécouvre des décors de la Domus Aurea de Néron, qui inspirent des décors appelés «grotesques» (car trouvés dans ce que l’on avait pris pour des grottes).

Ces motifs décoratifs mêlent des représentations animales, végétales ou humaines, encadrées par de fines structures (arabesques, guirlandes et architectures). Ses élèves reprennent ces motifs, comme ici, dans cette feuille de l’audacieux Perino del Vaga.

Les Trois Grâces (1503/1508), RaphaëlChâteau de Chantilly

Cinq cents ans après la mort de Raphaël, son art ne cesse de provoquer l’admiration. Le maître n’eut de cesse de chercher et d’innover, comme en témoigne l’extraordinaire collection de Chantilly. 


Figurant parmi les plus grands génies créatifs de l’histoire de l’art, il demeure plus que jamais une source inépuisable de surprises et d’interrogations.    

Crédits : histoire

Cette exposition virtuelle est issue de l’exposition «Raphaël à Chantilly : Le maître et ses élèves», organisée à l’occasion du 500ème anniversaire de la mort de Raphaël au Domaine de Chantilly, 7 mars – 5 juillet 2020
Commissariat : Mathieu Deldicque, conservateur du patrimoine au musée Condé
 
Les textes sont inspirés de ceux du catalogue de l’exposition Raphaël à Chantilly : Le maître et ses élèves, sous la direction de Mathieu Deldicque, co-édité par les éditions Faton et le Domaine de Chantilly, 2020

Crédits : tous les supports
Il peut arriver que l'histoire présentée ait été créée par un tiers indépendant et qu'elle ne reflète pas toujours la ligne directrice des institutions, répertoriées ci-dessous, qui ont fourni le contenu.
Accueil
Découvrir
Jouer
À proximité
Favoris