"Vue de Maisons à Delft", ou "La Ruelle"

La Ruelle (Around 1658), Johannes VermeerRijksmuseum

"La Ruelle" représente deux maisons du XVIe siècle sur une rue pavée.

Les façades sont reliées par un mur. Deux portes adjacentes donnent accès aux cours latérales.

Les quelques personnages du tableau sont plongés dans leurs occupations.

La scène dégage un sentiment de calme et de sérénité. Si les paysages urbains étaient populaires dans l'art néerlandais du XVIIe siècle, "La Ruelle" adopte une perspective quelque peu inhabituelle : au lieu d'une vue panoramique, on a droit aux façades de deux maisons modestes, qui ne présentent aucune activité notable. Unique dans sa simplicité, l'œuvre offre un aperçu paisible de la vie quotidienne à Delft au XVIIe siècle.

Mur patiné par le temps
Johannes Vermeer excellait dans le rendu des matières, comme en témoignent les différentes textures de ce tableau, d'un réalisme et d'une minutie remarquables.

Au lieu de peindre chaque brique en détail, Johannes Vermeer s'attache à traduire l'effet de la lumière qui tombe sur le mur vieilli.

Sur une couche de peinture brun-rougeâtre, l'artiste passe des coups de pinceau irréguliers pour marquer les différentes nuances de couleur et faire ressortir le travail de maçonnerie. Il y ajoute quelques touches de gris et de blanc pour les joints en ciment.

Grâce à une technique fluide, Johannes Vermeer réussit à créer un motif de briques très réaliste.

Symbole de Delft sur la porte
On peut vaguement deviner les couleurs de la ville de Delft (le noir et le blanc) sur le motif du sablier de la porte fermée : deux lignes diagonales qui se croisent au milieu.

Johannes Vermeer a sans doute voulu donner à cette porte un aspect vieilli par les intempéries, qui s'harmonise avec les autres éléments de façade, tous marqués par les injures du temps.

Personnage masqué
Au départ, Johannes Vermeer a peint une femme assise près de l'encadrement de la porte de droite. On distingue encore sa forme à l'œil nu.

Johannes Vermeer l'a retirée de la composition à un stade ultérieur, probablement pour renforcer la perception de la profondeur.

Enfants qui jouent
Père d'une famille très nombreuse (Johannes Vermeer a eu onze enfants), l'artiste a rarement représenté des enfants dans ses tableaux. En fait, les deux enfants qui jouent dans "La Ruelle" sont les seuls que l'on retrouve dans ses œuvres connues.

Les deux portes
Comme "La Ruelle" semble inspirée d'un lieu réel, elle a suscité de nombreuses tentatives d'identification. Aucune des hypothèses ne s'était avérée convaincante, jusqu'à ce que l'historien d'art Frans Grijzenhout propose une nouvelle théorie en 2015. Tout propriétaire d'une maison implantée sur les canaux de Delft était redevable d'une taxe pour l'entretien des quais, dont le montant était proportionnel à la largeur de la façade et des ouvertures. Méticuleusement tenu à jour, le registre des droits de quai a permis au professeur de localiser la seule adresse où l'on peut trouver deux portes adjacentes, comme celles figurant dans ce tableau : les numéros 40-42 de la Vlamingstraat. La tante du peintre, Ariaentgen Claes van der Minne, habitait au numéro 42 entre 1645 et 1670 environ. Il est donc très probable que Johannes Vermeer connaissait bien cette maison. Les deux bâtiments ont été remplacés au cours du XIXe siècle. Aujourd'hui, il ne subsiste plus que la porte de droite.

Personnages non reconnaissables
En supposant que le tableau illustre bien les numéros 40-42 de la Vlamingstraat, il est tentant d'identifier le personnage qui coud sur le pas de la porte comme Ariaentgen la tante de Johannes Vermeer ; ...

...la femme dans l'allée comme une de ses filles non mariées...

... et les enfants qui jouent sur le seuil de la maison comme ses petits-enfants, dont elle avait la charge à partir de 1663.

Cependant, il convient d'être prudent en avançant de telles hypothèses : aucune des silhouettes n'est clairement reconnaissable, et le tableau est généralement daté d'un peu plus tôt, aux alentours de 1658. Il semblerait que Johannes Vermeer n'ait pas voulu dépeindre des personnages spécifiques, mais plutôt offrir une représentation intemporelle de la vie quotidienne.

"La porte des tripes"
Ariaentgen Claes van der Minne, qui a vécu au 40-42 de la Vlamingstraat pendant de nombreuses années, gagnait sa vie en vendant des tripes. La porte d'entrée à côté de sa maison était connue sous le nom de Penspoort ("Porte des tripes") jusqu'au XIXe siècle. C'est donc peut-être la porte d'entrée que Johannes Vermeer a représentée dans ce tableau.

Dans l'allée, on aperçoit une femme simplement vêtue, penchée sur un tonneau, en train de s'affairer aux corvées ménagères.

Lierre
"La Ruelle" a également été perçue comme un symbole de la moralité et de la vie de famille. Depuis l'antiquité, le lierre représente l'amour et la fidélité. Dans une telle interprétation, les lianes au-dessus des fenêtres de la maison de gauche évoqueraient le dévouement absolu des femmes au domicile et au soin des enfants. Toutefois, il se peut que le lierre ait simplement poussé devant la maison. Les tableaux de Johannes Vermeer semblent souvent nous montrer des moments de la vie quotidienne, alors qu'il s'agit de scènes soigneusement élaborées, où la distinction entre symbolisme et réalité tend à se confondre.

Trois paysages urbains
Un catalogue de vente aux enchères de 1696 révèle que "La Ruelle" est l'un des trois paysages urbains réalisés par Johannes Vermeer. Le deuxième est la "Vue de Delft", tandis que le troisième demeure inconnu. Contrairement à "La Ruelle", la "Vue de Delft" présente un aperçu panoramique de la ville. On retrouve une similitude dans les nombreuses façades placées derrière ou à côté les unes des autres. Il n'est pas impossible que les maisons de "La Ruelle" figurent quelque part dans la "Vue de Delft".

Signature
Le tableau est signé "I VMeer" sur le mur blanc situé sous les fenêtres de la maison de gauche. Le I représente son prénom, Johannes, et les lettres V et M sont accolées.

Crédits : histoire

Cette exposition fait partie du projet de Google sur Johannes Vermeer.

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