Vaccins faits au Canada

Partie 1 : Variole – Diphtérie – Tétanos

La trousse du vaccinateur « Le Jenner », utilisée pour administrer le vaccin liquide contre la variole. (1924/1924), Blanzy, Poure & CieSource d'origine : Ingenium

L' introduction

De la fin des années 1800 au début des années 1900, les laboratoires européens et américains ont fait des avancées majeures en prévention des maladies. Ils ont produit des antitoxines pour des maladies qui avaient affligé l’humanité depuis des siècles, comme le tétanos et la diphtérie, et ont amélioré la production du vaccin contre la variole.

L’écurie où Dr John FitzGerald a lancé le Antitoxin Laboratory. (1914/1914), UnknownSource d'origine : Sanofi Pasteur Canada (Connaught Campus) Archives

À l’époque, le Canada n’avait pas les installations pour fabriquer des quantités importantes de ces médicaments salvateurs. 

Pour combler cette lacune, le médecin torontois Dr John G. FitzGerald s’est installé dans une petite écurie de cour où il pouvait produire l’antitoxine diphtérique.

À partir de cette petite entreprise, M. FitzGerald a proposé à l’Université de Toronto d’établir un laboratoire d’antitoxines indépendant sans but lucratif.  L’Université a accepté la proposition de M. FitzGerald en mai 1914 et le Antitoxin Laboratory est ainsi né. 

Le laboratoire a changé de nom plusieurs fois au fil des ans : Connaught Antitoxin Laboratories (1917 à 1923), Connaught Laboratories (1923 à 1946) et Connaught Medical Research Laboratories (1946 à 1972), avant sa privatisation en 1972.

Fiole du vaccin combiné DCT-polio de Connaught Medical Research Laboratories. (1970/1970), Connaught Medical Research LaboratoriesSource d'origine : Ingenium

Au cours des 58 années suivantes, il s’est spécialisé en santé publique et médecines préventives, notamment les antitoxines, les vaccins et l’insuline.

Distribution du « milieu 199 » dans des bouteilles Povitsky. (1954/1954), Connaught Medical Research LaboratoriesSource d'origine : Sanofi Pasteur Canada (Connaught Campus) Archives

Peu importe le nom, l’histoire de Connaught Laboratories est celle de la production de vaccins au Canada.  En 2002, une collection de matériel de Connaught Medical Research Laboratories a été confiée à Ingenium, dont une bonne partie est présentée dans ce texte.

Image de virions du virus de la variole au microscope. (1975/1975), CDC/ Dr. Fred Murphy; Sylvia WhitfieldSource d'origine : Centers for Disease Control and Prevention's Public Health Image Library (PHIL)

Variole

La variole était une maladie contagieuse potentiellement mortelle provoquée par un virus. Les victimes, atteintes de fièvre et de fatigue, développaient rapidement une éruption d’ampoules rouges. 

Pustules du début de la variole. (1908/1908), Casell and CompanySource d'origine : Wellcome Collection

Près de 30 % des malades mouraient, et beaucoup de personnes survivantes restaient aveugles et/ou défigurées par des cicatrices. 

Illustration de la variole, manuscrit japonais. (1720/1720), Kanda GensenSource d'origine : Wellcome Collection

La variole affligeait déjà l’humanité même avant l’existence des écrits historiques, quoique certains érudits croient qu’elle avait pris naissance dans le nord-est de l’Afrique autour de 10 000 AEC. Le long des anciennes routes commerciales, la variole s’est propagée au sud-est de l’Asie, à la Chine et à l’Europe, tuant des millions de personnes.

Panneau du Florentine Cortex illustrant les éclosions de variole dans les Amériques. (1540/1585), Bernardino de SahagúnSource d'origine : Florentine Codex

La variole est arrivée dans les Amériques avec les Espagnols, ravageant les communautés autochtones. Sans immunité contre ce nouveau virus, plus de 90 % des Autochtones d’Amérique du Nord et d’Amérique du Sud en sont morts. Dans certaines régions, comme à Cuba, aucun Autochtone n’a survécu.

En Afrique et en Asie, une technique connue sous le nom de variolisation s’est développée au fil des siècles. C’est-à-dire que les gales de malades étaient utilisées pour inoculer les personnes en santé, provoquant une version plus légère de la maladie suivie de l’immunité. Cette technique était risquée, toutefois, car elle pouvait transmettre d’autres maladies au patient en santé ou potentiellement provoquer une véritable infection de variole.

En 1716, un homme d’Afrique occidentale, Onesimus, avait été asservi par le pasteur puritain Cotton Mather, à Boston. Onesimus a partagé la technique de variolisation contre la variole avec M. Mather. Cette méthode efficace a finalement été largement adoptée dans les colonies et en Europe occidentale. 

Page titre du livre An Historical Account of the Small-pox Inoculated in New England de Zabdiel Boylston. (1730/1730), Zabdiel BoylstonSource d'origine : An Historical Account of the Small-pox Inoculated in New England

M. Mather et le médecin Zabdiel Boylston ont mis la technique de variolisation à l’essai en 1721, inoculant chacun leur famille et celles qu’ils avaient asservies. Ils ont décrit leur travail dans un libelle, An Historical Account of the Small-pox Inoculated in New England.

Edward Jenner qui vaccine un garçon (peinture). (1884/1884), E.-E. HillemacherSource d'origine : Wellcome Collection

Le premier vaccin efficace à combattre la propagation de la variole a été développé par Dr Edward Jenner en 1796, s’appuyant sur la technique de variolisation démontrée par Onesimus et décrite dans le libelle de M. Boylston.

Son idée de dériver le vaccin de la variole des vaches, une maladie apparentée, mais moins sévère, a rendu sa technique moins risquée pour le patient.

Au Canada, Dr Alexander Stewart de Palmerston a fondé la Ontario Vaccine Farm en 1885, après une éclosion particulièrement mortelle à Montréal qui s’est propagée à l’est de l’Ontario.

La production de vaccins contre la variole a été transférée au Antitoxin Laboratory en 1916 afin de répondre à la demande causée par la Première Guerre mondiale. 

Les vaches étaient utilisées pour produire le vaccin contre la variole. par UnknownSource d'origine : Canada Science and Technology Museum Archives/L'archives du Musée des sciences et de la technologie du Canada

Le vaccin contre la variole a été produit en introduisant le virus de vaccinia (parente de la variole des vaches) à des veaux. Une réaction s’est produite sur leur bas-ventre, laquelle a ensuite été piquée avec des aiguilles.

Ces aiguilles étaient ensuite piquées dans l’avant-bras du patient recevant le vaccin pour stimuler l’immunité.

Trousse de vaccination contre la variole développée et produite par Connaught Laboratories. (1939/1939), Connaught Medical Research LaboratoriesSource d'origine : Ingenium

Connaught a produit un vaccin « glycériné » (purifié avec de la glycérine et de l’eau stérile) plutôt que des aiguilles à vacciner, lequel était plus sécuritaire et avait une durée de vie plus longue.

Instruments de vaccination sur une page d’un catalogue de fournitures médicales. (1908/1908), Allen & Hanburys Ltd.Source d'origine : Allen & Hanburys Ltd.

Techniques de vaccination

Préalablement aux avancées des années 1950, le vaccin contre la variole pouvait être administré de deux façons : en grattant ou en perçant la peau.

En grattant : L’administrateur grattait le bras du patient, puis frottait le vaccin dans l’égratignure.

En perçant : Une goutte de vaccin était placée sur la peau, puis une aiguille était utilisée pour la percer.

Le vaccin contre la variole administré à l’aide d’une aiguille bifurquée. (2002/2002), James Gathany/CDCSource d'origine : Centers for Disease Control and Prevention's Public Health Image Library (PHIL)

Plus tard, une aiguille bifurquée (deux pointes) trempée dans une petite quantité de vaccin était utilisée pour percer la peau plusieurs fois, laissant une cicatrice distinctive.

La variole est la seule maladie à avoir été déclarée comme étant éradiquée par l’Organisation mondiale de la Santé grâce à des campagnes de vaccination mondiales.

Bactérie Corynebacterium diphtheriae. (1973/1973), Dr. P.B. Smith/CDCSource d'origine : Centers for Disease Control and Prevention's Public Health Image Library (PHIL)

Diphtérie

La diphtérie, la maladie mortelle causée par la bactérie Corynebacterium diphtheriae, était la principale cause de mortalité chez les enfants canadiens jusqu’au milieu des années 1920. Elle tuait plus de 2 000 personnes chaque année.  

La diphtérie produit une toxine dans le corps, entraînant la formation d’une couche collante sur les parois de la gorge et les tissus du nez qui bloque la respiration. Dans la langue familière, on l’appelait « l’étrangleuse ».

Affiche avertissant les passants qu’un résident d’un foyer était infecté par la diphtérie. (1900/1950), UnknownSource d'origine : Ingenium

Tout comme la variole, la diphtérie se propage par des gouttelettes que la personne infectée expulse dans l’air. Sans accès à des traitements efficaces, les patients étaient mis en quarantaine à la maison.

L’antitoxine diphtérique était injectée à l’aide de seringues d’antitoxine. (1908/1908), Allen & Hanburys Ltd.Source d'origine : Allen & Hanburys Ltd.

L’antitoxine diphtérique, créée en Allemagne en 1890, était le seul traitement efficace contre la diphtérie, et ce, jusqu’à ce qu’un vaccin soit développé en 1926. Les réserves au Canada étaient insuffisantes et le coût était hors de portée pour la plupart des Canadiens avant 1914.

Dr FitzGerald a fondé le Antitoxin Laboratory en 1914 pour produire l’antitoxine diphtérique au Canada et l’a vendue au bureau d’hygiène de l’Ontario au prix coûtant.

La vaccination contre la diphtérie était encore à l’étape des essais médicaux en janvier 1929, lorsqu’une communauté éloignée du nord de l’Alberta, Little Red River, a envoyé un télégramme désespéré à Edmonton : DIPHTÉRIE. CRAIGNONS L’ÉPIDÉMIE. ENVOYEZ ANTITOXINE.

Début du voyage de M. Horner et M. May pour livrer 200 fioles d’antitoxine diphtérique. (1929/1929), UnknownSource d'origine : Canada Aviation and Space Museum Archives/L'archives du Musée de l'aviation et de l'espace du Canada

Le célèbre as de l’aviation de la Première Guerre mondiale Wilfrid « Wop » May, avec son partenaire d’affaire Vic Horner, a réalisé un vol dangereux pour livrer l’antitoxine diphtérique afin de traiter les personnes atteintes ainsi que le nouveau vaccin à l’anatoxine pour inoculer la communauté. 

L’épidémie a été maîtrisée et seulement une personne est décédée.

Lt Jean Lanctôt, blessé durant la Première Guerre mondiale. (1918/1918), UnknownSource d'origine : Canada Aviation and Space Museum Archives/L'archives du Musée de l'aviation et de l'espace du Canada

Tétanos

Durant la Première Guerre mondiale, le tétanos était une préoccupation importante chez les soldats blessés. Les bactéries tétaniques vivent dans le sol, la poussière et le fumier, et les soldats combattaient sur des terres agricoles où on avait épandu du fumier. 

Idéalement, tous les soldats auraient reçu un vaccin contre le tétanos dans le cadre de leur traitement pour les protéger contre cette infection mortelle.  Il n’y avait pas de réserve nationale, donc le Antitoxin Laboratory a commencé à produire l’antitoxine tétanique pour les troupes canadiennes en 1916. 

Cliquez ici pour accéder à la Partie 2 : La grippe - Polio - Vaccins combinés.

Crédits : histoire


Ingenium aimerait remercier Dr Christopher Rutty d’avoir fourni des services de consultation sur ce projet et travaillé sur l’histoire de la vaccination et des maladies au Canada.
 
Voici d’autres ressources à consulter :
 
A History of Connaught Laboratories
Une série d’articles rédigés par Dr Christopher Rutty sur l’histoire de Connaught Laboratories et de la santé publique au Canada.
 
Vaccines and Immunization: Epidemics, Prevention and Canadian Innovation
Exposition en ligne du Dr Christopher Rutty pour le Museum of Health Care.
 
The Spanish Flu and Canadian Influenza Vaccine Initiatives
Par Dr Christopher Rutty
 
L’histoire de Connaught
Une partie de Insuline100 : La découverte de l’insuline, projet pour Moments déterminants Canada (Dr Christopher Rutty)
 
Sanofi Pasteur: The Legacy Project Chronologie de la recherche sur la vaccination et le développement à Connaught Laboratories, de 1914 jusqu’à maintenant (Dr Christopher Rutty).

Crédits : tous les supports
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