Boxeurs (1818), Théodore GéricaultChâteau de Chantilly
Théodore Géricault (1791-1824) est un peintre, sculpteur, dessinateur et lithographe français.
Le musée Condé à Chantilly conserve une collection presque complète de ses lithographies, acquise en 1866 par Henri d'Orléans, duc d'Aumale (1822-1897), donateur de Chantilly à l'Institut de France.
Roulier montant une côte par Théodore GéricaultChâteau de Chantilly
Qui est Géricault ?
Particulièrement connu pour ses représentations de chevaux, Géricault est une figure éminente du romantisme, un mouvement artistique qui se diffuse en Europe au cours de la première moitié du XIXᵉ siècle.
Le romantisme se traduit par un intérêt pour les émotions et la nature, souvent à travers un travail sur la couleur et le mouvement.
Géricault est aussi connu pour avoir utilisé l'actualité dans ses œuvres : il montre les souffrances des soldats de l'Empire sous Napoléon Iᵉʳ (1804-1814/1815) et s'intéresse à la question de l'esclavage.
Son plus célèbre tableau, Le Radeau de la Méduse, exposé Salon de 1819 et conservé au Louvre, est une critique du régime de la Restauration (1814-1830).
Caisson d'artillerie (1818), Théodore GéricaultChâteau de Chantilly
La lithographie
La lithographie est une technique d'impression à partir d’un tracé exécuté sur une pierre calcaire à la texture dense.
La surface destinée à recevoir le dessin est poncée avec du sable et de l’eau puis on exécute le dessin avec de la craie ou de l’encre grasses.
Durant le tirage, on mouille la pierre et on dépose de l’encre aux endroits imprégnés du gras du dessin. L’humidité repousse l’encre aux endroits qui ne sont pas graissés.
On pose ensuite le papier et on passe sous presse.
Cette technique rapide et bon marché a permis la création et la reproduction à grande échelle à partir de la fin du XVIIIᵉ siècle.
Course de chevaux libres par Théodore GéricaultChâteau de Chantilly
Les débuts
Géricault échoue au prix de Rome en 1816, concours de l'Académie des beaux-arts qui permet aux jeunes artistes de partir se former en Italie , mais il s’y rend à ses propres frais.
On le comprend à travers cette illustration de la course de chevaux libres, une tradition ancienne du carnaval de Rome.
Il y assiste durant son séjour et y consacre de nombreux dessins.
Boxeurs (1818), Théodore GéricaultChâteau de Chantilly
Sport d’origine anglaise, la boxe est seulement tolérée en France lorsque Géricault réalise cette lithographie.
Le boxeur noir y est représenté comme l’égal de son adversaire blanc. Cette image forme une déclaration politique républicaine de son auteur, engagé contre l’esclavage.
Shipwreck of the Meduse par Théodore GéricaultChâteau de Chantilly
Le Radeau de la Méduse, chef-d’œuvre de Géricault, fut exposé en Angleterre en 1820.
Cette reproduction lithographiée était remise aux visiteurs accompagnée d’un livret décrivant le naufrage de la frégate de « La Méduse », qui tua environ 135 personnes en 1816.
On observe quelques différences avec le tableau final dont un changement de perspective dans la partie inférieure du bateau.
Mameluk de la Garde impériale défendant un trompette blessé contre un cosaque (1818), Théodore GéricaultChâteau de Chantilly
L' époque Napoléonienne
Appartenant aux milieux bonapartistes, Géricault réhabilite à travers cette image les mameluks.
Ces cavaliers égyptiens de la Garde impériale, qui avaient servi sous Napoléon, ont souffert de racisme et de violence sous la Restauration (1814-1830).
Retour de Russie (1818), Théodore GéricaultChâteau de Chantilly
Dans son œuvre, Géricault représente la gloire de l’épopée napoléonienne (les conquêtes militaires de Napoléon) mais insiste aussi sur les misères de la guerre.
On voit ici les troupes de l’Empire pendant la retraite en Russie, un épisode très meurtrier.
Le cheval mort par Théodore GéricaultChâteau de Chantilly
Cette lithographie traite aussi de la retraite de Russie et des malheurs de la guerre, en se consacrant à la carcasse d’un cheval.
Les corbeaux qui tournoient dans le ciel chargé de neige créent une atmosphère lourde et inquiétante, typique du romantisme de Géricault.
Passage du Mont St Bernard (1822), Théodore GéricaultChâteau de Chantilly
Il s’agit d’une illustration pour un ouvrage appelé La Vie politique et militaire de Napoléon. Dans cette représentation positive de la campagne militaire de Napoléon en Italie, on voit l’Empereur, sur une pente enneigée, une main dans son gilet.
Napoléon remercie les moines apportant du pain aux soldats.
Pity the sorrows of a poor old Man, Whose trembling limbs have borne him to your door (1821), Théodore GéricaultChâteau de Chantilly
L' Angleterre
Durant ses séjours à Londres en 1820-1821, Géricault dénonce dans ses lithographies la réalité sociale des débuts de la révolution industrielle.
Sur cette estampe, l’artiste montre les conséquences de l’exode rural à travers la figure d’un mendiant à la porte d’une boulangerie.
A Paraleytic Woman (1821), Théodore GéricaultChâteau de Chantilly
Cette estampe représentant une femme malade peut avoir plusieurs interprétations.
Ce peut être une simple évocation de la maladie et de la mort , mais aussi peut-être de la syphilis, maladie alors incurable qui ravageait la société.
Certains ont interprété le carrosse, figuré en arrière-plan, comme une annonciation de sa mort, tandis que d’autres y voient le symbole de l’indifférence de la société.
The English Farrier (1821), Théodore GéricaultChâteau de Chantilly
Lors de son séjour en Angleterre, Géricault produit des images pittoresques, comme ces deux maréchaux-ferrants qui s’occupent de trois chevaux dont l’un, portant une couverture quadrillée, cherche à mordre son camarade.
On perçoit ici la connaissance et l’affection de Géricault pour les chevaux.
Lion dévorant un cheval par Théodore GéricaultChâteau de Chantilly
Représentations animales
C’est également en Angleterre que Géricault découvre les peintres animaliers de l’époque romantique, comme George Stubbs (1724-1806).
Intéressé par le thème du lion attaquant le cheval, il le traite à deux reprises, une première fois ici, à la plume.
Etude d’une hure et de pieds de sanglier (1811-1824), Théodore GéricaultChâteau de Chantilly
Au cours de sa carrière, Géricault s’est passionné pour la représentation des animaux, comme le cheval mais aussi le sanglier.
On peut supposer que ce bon cavalier a sûrement participé à des chasses au sanglier.
Mazeppa (1823), Théodore GéricaultChâteau de Chantilly
Le Romantisme
Cette lithographie créée avec Eugène Lami (1800-1890) est basée sur le poème Mazeppa (1818) de Lord Byron, qui décrit l’histoire d’un noble ukrainien attaché nu à son cheval pour avoir fréquenté une femme mariée.
Ce supplice évoque les souffrances du génie incompris, un thème romantique par excellence.
Le Giaour par Théodore GéricaultChâteau de Chantilly
L' Orientalisme
Cette autre collaboration avec Eugène Lami illustre ici les Contes Orientaux de Byron (1813), plus précisément la rivalité entre le Giaour, chrétien originaire de Venise, et Hassan, un musulman, pour les faveurs de la belle Leïla, une femme grecque.
Cette allégorie de la guerre d’indépendance grecque (1821-1829) est représentative du courant orientaliste, cette curiosité des artistes européens pour les pays du Maghreb et du Moyen-Orient au XIXᵉ siècle.
Je rêve d’elle au bruit des flots par Théodore GéricaultChâteau de Chantilly
Cette estampe de Géricault obéit aux codes orientalistes et romantiques, puisqu’elle représente un homme en costume oriental, à l’attitude mélancolique face à une mer déchaînée.
On y voit donc une idéalisation de la nature et des cultures étrangères, mais surtout le souci de l’artiste sur l'expression des sentiments, typique de l’idéal romantique.
Le Giaour par Théodore GéricaultChâteau de Chantilly
Théodore Géricault, grand amoureux des chevaux, fut fasciné par bien des thèmes romantiques et orientalistes.
Son œuvre reflète les mouvements politiques et artistiques de l’Europe du début du XIXᵉ siècle.
En collectionnant ses estampes, le duc d’Aumale, fils du roi Louis-Philippe et grand érudit de son époque, a reconnu le talent de cet artiste de génie, pourtant engagé contre la monarchie.
Une exposition virtuelle issue de l’exposition « Géricault au musée Condé de Chantilly » organisée au Domaine de Chantilly, du 15 juillet au 14 octobre 2018. Commissariat : Nicole Garnier-Pelle, Conservateur général du Patrimoine, chargée du musée Condé.
Les textes sont inspirés de ceux du catalogue de l’exposition «Géricault au musée Condé de Chantilly », par Nicole Garnier-Pelle, co-édité par les éditions Faton et le Domaine de Chantilly, 2018.
Exposition virtuelle conçue par Clara Voiry.
Images ©RMN-Grand Palais domaine de Chantilly
Pour toutes commandes, merci de contacter www.photo.rmn.fr