Un peintre de l'âge d'or
Johannes Vermeer (1632-1675) est souvent considéré comme l'une des "perles" parmi les peintres néerlandais du XVIIe siècle. Il est né à Delft, une ville de la république des sept Provinces-Unies des Pays-Bas, à une époque caractérisée par une grande prospérité économique. C'est la raison pour laquelle on parle également d'âge d'or. Ces conditions sont favorables à l'épanouissement de la peinture. "L'Art de la peinture" est l'une des œuvres les plus marquantes de Johannes Vermeer. Dans cette ode à sa profession, il a inclus une carte de la riche république.
Vue de Delft (c. 1660 - 1661), Vermeer, JohannesMauritshuis
Le jeune Johannes
Le 31 octobre 1632, Reynier Jansz (env. 1591-1652) et Digna Baltens (env. 1595-1670) ont fait baptiser leur nouveau-né du nom de "Joannis" à la Nieuwe Kerk de Delft. Leur petit garçon, devenu peintre virtuose, "maître de la lumière", saura faire résonner ce prénom à travers les siècles. Un peu moins de 30 ans après son baptême, il a représenté la Nieuwe Kerk dans "Vue de Delft", une œuvre désormais célèbre dans le monde entier.
A Young Woman standing at a Virginal A Young Woman standing at a Virginal (about 1670-2), Johannes VermeerThe National Gallery, London
Johannes Vermeer et Delft
Delft, centre névralgique du commerce avec l'Asie et l'Amérique, possédait des faïenceries et industries textiles florissantes. Inspirées par la porcelaine chinoise que les marchands ramenaient d'Asie, les manufactures de Delft produisaient de la faïence émaillée blanche décorée de peinture bleue : le bleu de Delft. Les carreaux de Delft apparaissent dans de nombreuses scènes d'intérieurs réalisées par Johannes Vermeer, dont "Une dame debout au virginal" que l'on voit ici.
Une œuvre restreinte mais magnifique
Étonnamment, Johannes Vermeer ne nous a légué qu'une œuvre limitée : nous ne connaissons aujourd'hui que 36 tableaux de l'artiste. Il était peu productif, mais utilisait des matériaux onéreux. Ce détail permet de penser qu'il s'adressait au segment supérieur du marché artistique. De son vivant, il a vendu de nombreuses toiles à Pieter Claesz van Ruijven (1624-1674), un riche collectionneur d'art. Ayant ensuite hérité des tableaux, le gendre de ce dernier, Jacob Dissius (1653-1695), se sépare de 21 œuvres lors d'une vente aux enchères. Parmi celles-ci figurent les célèbres "La Ruelle", "La Jeune Fille à la perle" et "La Dentellière", mais aussi plusieurs peintures qui ont aujourd'hui disparu, telles qu'un deuxième exemplaire de "La Ruelle".
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Le fils d'un homme à tout faire
Le père de Johannes Vermeer, Reynier Jansz, était un homme polyvalent. Tisserand d'étoffes de soie appelées "caffa" et aubergiste, il était aussi inscrit en tant que marchand d'art à la guilde de Saint-Luc de Delft, l'association professionnelle des peintres. Il pratiquait cette dernière activité depuis une auberge appelée "De Vliegende Vos" (Le Renard volant) et située dans la Voldersgracht, à Delft, non loin du bâtiment abritant la guilde des peintres. En 1641, toute la famille s'est installée dans la maison "Mechelen", plus en aval du canal, où il a continué à exploiter une auberge et à vendre des œuvres d'art.
View of the Market (c. 1720), J. RademakerMauritshuis
Sur les traces de son père
Après la mort de son père, en 1652, Johannes Vermeer, alors âgé de 20 ans, a repris l'activité de marchand d'art et d'aubergiste. Un an plus tard, il s'est inscrit en tant que "maître peintre" à la guilde de Saint-Luc. Il est possible que le lien de son père avec la guilde ait influencé son choix de carrière. Toutefois, nous ne savons pas avec certitude quand et de qui Johannes Vermeer a appris sa profession.
L'auberge "Mechelen", détail d'une œuvre de J. Rademaker représentant le marché, env. 1720. Delft, archives de la ville
Woman Holding a Balance (c. 1664), Johannes VermeerNational Gallery of Art, Washington DC
Une union enviable
Le 20 avril 1653, Johannes Vermeer a épousé une femme catholique du nom de Catharina Bolnes (env. 1631-1688). Elle était la fille cadette de Maria Thins (env. 1593-1680) et Reynier Bolnes (décédé en 1674), un couple fortuné. Protestant, Johannes Vermeer s'est converti au catholicisme avant le mariage : un fait rare à l'époque. Les époux ont eu au moins 14 enfants, dont 11 ont vécu plus longtemps que leur père.
Un jeune professionnel ambitieux
Au début de sa carrière, Johannes Vermeer produisait des peintures d'histoires. Elles représentent des contes bibliques ou mythologiques, ou des récits tirés de la littérature. À l'époque, ce type de peintures était considéré comme la forme d'expression la plus noble. Il fallait en effet être instruit pour pouvoir appréhender et peindre ces sujets.
«Après tout, il fallait savoir lire et écrire pour comprendre et peindre ces sujets. Une nouvelle oeuvre de Vermeer aurait potentiellement été découverte récemment: "Saint Praxedis" - une peinture d'histoire. Cependant, les experts de Vermeer de référence ne sont pas d’accord sur sur l'authenticité du tableau. Saint Praxedis n’est donc pas actuellement inclus dans l’œuvre de Vermeer.
A Young Woman seated at a Virginal A Young Woman seated at a Virginal par Johannes VermeerThe National Gallery, London
Les tableaux appartenant à la belle-mère de l'artiste
Les premières œuvres de Johannes Vermeer se caractérisent par un grand format ainsi que par un contraste marqué entre l'ombre et la lumière. Il s'est inspiré du travail des peintres d'Utrecht, eux-mêmes influencés par des maîtres italiens tels que le Caravage. La belle-mère de l'artiste, Maria Thins, possédait trois tableaux de ces peintres néerlandais. À la fin de sa carrière, Johannes Vermeer a inclus l'un d'eux, "L'Entremetteuse" de Dirck van Baburen, à l'arrière-plan de "Jeune femme jouant du virginal". Bien qu'il n'appliquait plus alors le style de l'école d'Utrecht, son ancienne source d'inspiration reste bien visible dans cette œuvre.
La Laitière (Around 1660), Johannes VermeerRijksmuseum
Scènes de la vie quotidienne
En 1656, Johannes Vermeer a commencé à peindre des scènes d'intérieurs de plus petite taille. Ces scènes de la vie quotidienne, aussi appelées "peintures de genre", étaient des décorations très en vogue à l'époque. À ce moment, l'artiste appliquait sa peinture en couches épaisses et y ajoutait de petits points afin de suggérer le reflet de la lumière.
Jeune Femme à l'Aiguière (ca. 1662), Johannes VermeerThe Metropolitan Museum of Art
Un nom établi
Au cours des années suivantes, le peintre débutant s'est forgé une réputation de grand maître. En 1662, il est même élu à la tête de la guilde de Saint-Luc. Au fil du temps, son style pictural s'est développé. Il a commencé à peindre par couches plus minces, à atténuer l'incidence de la lumière ainsi que les contours dans ses œuvres.
La Jeune Fille à la Perle (c. 1665 (digitized by Madpixel)), Johannes VermeerMauritshuis
Tronies
Outre des paysages urbains, des peintures d'histoires, des allégories et des peintures de genre, Johannes Vermeer a également réalisé plusieurs tronies (œuvres qui dépeignent le visage de personnages). Ces peintures ne constituent pas des portraits de personnes spécifiques, mais des études de certains "types" d'individus. Le tronie le plus célèbre de l'artiste est "La Jeune Fille à la perle". La jeune fille de la toile porte des vêtements exotiques et un turban oriental. Une perle démesurée pend à son oreille.
A Young Woman standing at a Virginal A Young Woman standing at a Virginal (about 1670-2), Johannes VermeerThe National Gallery, London
Les dernières œuvres de Johannes Vermeer
Les œuvres créées par Johannes Vermeer à la fin de sa carrière se distinguent par des coups de pinceau plus plats, des compositions plus stylisées et des contours plus nets. À cette période, le commerce de l'art commençait à décliner. La déclaration de guerre simultanée de la France, de l'Angleterre, de Münster et de Cologne a mis fin à la prospérité économique de la république et a marqué le début de la "rampjaar" (année désastreuse) de 1672. Le commerce d'art de Johannes Vermeer n'a pas résisté à cette tourmente.
Vue de Delft (c. 1660 - 1661), Vermeer, JohannesMauritshuis
L'épilogue
Johannes Vermeer est mort de causes inconnues en 1675, à l'âge de 43 ans. Un peu plus de dix ans auparavant, il avait réalisé "Vue de Delft", où l'on aperçoit à la fois la Nieuwe Kerk (lieu de son baptême) et la Oude Kerk (lieu de sa sépulture). Nous ne savons pas avec certitude s'il existe un autoportrait de Johannes Vermeer. Ce paysage urbain, véritable lien entre son œuvre et sa vie, pourrait donc bien être le tableau le plus représentatif de l'artiste en tant que personne.
Cette exposition fait partie du projet de Google sur Johannes Vermeer.
L'image gigapixel La Jeune Fille à la perle a été numérisé par Madpixel et fait partie de l'application Second Canvas Mauritshuis
