À pied d'œuvre(s)
Dans cette exposition, commencez par regarder vos pieds ! Car c'est principalement au sol que se déploient les œuvres, sculptures, photographies et vidéos venues du Centre Pompidou à l'occasion de son 40e anniversaire. Descendues de leur piédestal, elles viennent jouer avec les parquets, carreaux et marbres des salons d'apparat de la Monnaie de Paris. Alors, regardez les sols et écoutez les commentaires des artistes et commissaires d'À pied d'œuvre(s)... Bonne découverte !
01 | Occupations des sols
Regardez : 4 artistes, 4 vidéos : vidéo d'une sculpture monumentale, vidéo à même le sol, vidéo d'une performance dans un paysage urbain, vidéo d'un geste. La sculpture est alors présente par sa seule image.
"Robert SMITHSON est un artiste qui appartient au courant du Land Art.(…) Cette œuvre n'est pas seulement un document. Il s'agit d'une œuvre à part entière.(…) [Il commente] la vidéo avec un texte qui a une dimension autant poétique qu'explicative, avec un texte qui est très beau, et qui nous donne des éléments de compréhension et de projection dans ce qu'est cette gigantesque installation qu'il est encore possible de visiter aujourd’hui aux Etats-Unis."
Mathilde DE CROIX, Commissaire associée
"Je fais des poèmes en mouvement."
Pipilotti RIST (Entretien avec Marie de Brugerolle, Documents sur l'art, n° 8, printemps 1996, p. 23)
"Mon art repose sur la croyance en une énergie universelle qui traverse tout, de l'insecte à l'homme, de l'homme au spectre, du spectre à la plante, de la plante à la galaxie. (…) Mes œuvres sont les veines d'irrigation du fluide universel."
Ana MENDIETA
"Le poids est pour moi une valeur, non qu'il soit plus contraignant que la légèreté, mais j'en sais davantage sur le poids que sur la légèreté (...)"
Richard SERRA, Le Poids in Richard Serra : Écrits et Entretiens 1970-1989, Daniel Lelong éditeur, Paris
02 | Chutes
Ne soufflez pas trop fort ! L’œuvre de Michel BLAZY, construite par demi-cercles successifs, occupe tout l'espace droit du Piano Nobile de l'Escalier d'Honneur. Ici, le matériau peut surprendre : du papier toilette, dont les feuilles simplement posées sont soumises au courant d'air...
Sans titre (1993/1994) by Michel BLAZYMonnaie de Paris
"J'essaie de ne pas figer la forme, donc à chaque fois qu'on montre [cette œuvre], on la réadapte à l'espace.(...) C'est le matériau le plus dérisoire possible, le plus pauvre possible, le moins adapté à réaliser une construction. Cela donne une construction dont on sent la fragilité.(...) Je recherchais un matériau qui puisse ne pas acquérir de noblesse et qui garde son côté dérisoire.(...) Et cette pièce est très "chic" aussi !".
Michel BLAZY
03 | Allégorie
Voyez comme la lumière illumine chacune des sphères rouges... Pour l'artiste, "la sphère interroge tout, critique tout, est tout". Le rouge représente l'immortalité. Composée de 1000 boules de verre disposées dans une arabesque symétrique, cette œuvre créée pour la Chapelle de la Vieille Charité à Marseille, envahit aujourd'hui le sol du salon Guillaume Dupré.
Red Angel of Marseille (1993) by James Lee BYARSMonnaie de Paris
"Quand James Lee BYARS a vu la chapelle de la Veille Charité, il a pensé à réaliser cette pièce qu'il a appelé "L'ange de Marseille". (...) [L'artiste] redonne une dimension spirituelle à un certain minimalisme."
Bernard BLISTÈNE, directeur du Musée national d’art moderne - Centre de création industrielle
04 | Ci-gît l’espace
Attention où vous mettez les pieds ! 4 artistes pour des œuvres phares de l'histoire de l'art moderne : DUCHAMP, GIACOMETTI, KLEIN, MAN RAY. Cette salle synthétise le basculement à l'horizontal de la sculpture et de la peinture.
"Je suis un respirateur."
Marcel DUCHAMP
Femme égorgée (1932/1940) by Alberto GIACOMETTIMonnaie de Paris
"Plus on s’approche de la chose, plus on s’éloigne."
Alberto GIACOMETTI
"C'est une œuvre passionnante parce qu'elle fonctionne avec plein de registres différents : certains éléments accrochés lui donnent une mobilité potentielle quasi infinie."
Frédéric PAUL, Commissaire associé
RP3, Ci-gît l’Espace (1960) by Yves KLEINMonnaie de Paris
"L'or imprègne le tableau et lui donne vie éternelle."
Yves KLEIN
"Ci-gît l'Espace est évidemment une œuvre horizontale : c'est un tableau que Yves KLEIN a décroché et qu'il a transformé en pierre tombale.(...) On sent en regardant cette œuvre le passage du vertical à l'horizontal, on le vit et on le comprend dans le regard d'Yves KLEIN."
Camille MORINEAU, Commissaire de l'exposition
05 | Corps mesure
Quelle taille mesurez-vous ? Depuis les années 60, les artistes intègrent leur propre corps dans leurs œuvres, jouant sur l'échelle humaine, sa masse et son environnement. Le corps devient alors sculpture, le corps devient mesure. À travers la performance, ORLAN et VALIE EXPORT utilisent leur corps comme un instrument pour décrire des espaces à leur mesure et défendent ainsi la place du corps et plus spécifiquement du corps féminin dans la société et dans l'art.
MesuRages (1977-12-02) by ORLANMonnaie de Paris
"Je voulais prendre mon corps comme un étalon, accaparer le territoire de l'institution, un peu d'une manière animale puisqu'il s'agissait d'être à quatre pattes sur le sol puis de tracer un trait à la craie derrière ma tête et donc de prendre la mesure de mon corps dans cet espace et de recommencer pour savoir le nombre d'Orlan-corps qui était contenu dans cet espace."
ORLAN
06 | Échantillonnage
Ces objets vous intriguent ? Il s'agit d'objets et de matières de récupération, disposés selon une spirale en escalier qui occupe le sol de la salle Babut de Rosan : l'artiste Tony CRAGG crée une confrontation du visiteur avec une réalité brute, sans qu'elle soit dénuée d'une unité esthétique et chromatique.
"[J'essaie] de mettre le vocabulaire naturel des matériaux à égalité avec les matériaux artificiels créés par l'homme."
Tony CRAGG
Infinito (L’infini) (1989) by Luciano FABROMonnaie de Paris
07 | Infini
Plongez dans cet infini... Les œuvres mises en regard dans cette salle traite d'une certaine conception de l'infini : Luciano FABRO donne une forme plastique au signe, Sophie RISTELHUEBER joue sur les échelles d'un désert sans limite.
"La pièce de FABRO s'est imposée parce qu'elle a cette ambition d'être l'infini. Elle remplit l'espace de manière paradoxale parce qu'elle le remplit peu finalement : elle définit plutôt une sorte de périmètre et, par définition puisque l’œuvre s'intitule "Infinito", elle abat toutes les barrières."
Frédéric PAUL, Commissaire associé
"En passant des vues aériennes au sol, j'ai cherché à faire perdre toute notion d'échelle, comme dans l'Élevage de poussière, de Marcel DUCHAMP. C'est une image qui me fascine et que j'ai gardée en tête pendant tout ce travail. Cette balade entre l'infiniment grand et l'infiniment petit déstabilise le spectateur. C'est une bonne illustration de la relation que nous avons au monde. Nous disposons de moyens modernes pour tout voir, tout appréhender mais, en fait, nous ne voyons rien." Sophie RISTELHUEBER, Le Monde (Paris), 27 septembre 1992, p. 14 « Les obsessions de Sophie Ristelhueber » par Michel Guerrin.
08 | Gravité
Reconnaissez-vous les matériaux utilisés pour ces œuvres ? Les 3 artistes présentés dans la salle partagent la même fascination pour des matériaux dont la pesanteur ancre ici les œuvres au sol.
Bois flotté et stratifié, polyester et graphite (1978) by Toni GRAND (Antoine GRAND, dit)Monnaie de Paris
"[Je] préfère un matériau sans valeur, sans détail ou anecdote repérable, sans date, ce qui bouscule peut-être la ligne passé-présent-futur."
Toni GRAND
"Le cartel renseigne, énormément... Qui pourrait effectivement imaginer des bois flottés derrière ces carapaces très lisses et très finies ?"
Frédéric PAUL, Commissaire associé
"La mémoire (…) est la seule chose qui permette de mesurer et faire exister le temps."
Tatiana TROUVÉ, entretien avec Hans Ulrich Olbrist.
09 | À plat
Étonnant, non ? Une sculpture sans volume, qui se contente de rester au sol. Pour l'artiste Carl ANDRE, forme = structure = lieu, et ainsi toute œuvre révèle l'espace avec lequel elle rentre en résonance.
"Je ne fais que poser la Colonne sans fin de Brancusi à même le sol au lieu de la dresser vers le ciel."
Carl ANDRE
10 | Terres sacrées
Vous sentez... ? Les pigments purs et épices qui composent l’œuvre de Claudio PARMIGGIANI envahissent l'espace par leur éclat visuel et olfactif. L’œuvre ici n'est pas une peinture mais un rite qui s'accomplit au sol et crée un espace sacré.
"L'alphabet de la peinture n'appartient ni à la parole, ni à la pensée logique. L'art n'a besoin d'aucune réponse ; c'est une vraie question qui veut demeurer telle. Commencer à parler de son propre travail signifie commencer à se taire parce que l’œuvre est une initiation au silence."
Claudio PARMIGGIANI, L'alphabet de la peinture/Extrait de Stella Sangue Spirito, 1995
11 | Terre à terre
Voyez-vous les reflets de lumière sur les clous ou ceux de la Seine qui se reflètent sur les murs ? Dans cette salle Jacques-Denis Antoine, 3 artistes traitent de la silhouette, matérielle ou immatérielle.
Die Ziehende Tiefe/The Wandering Depth (Profondeur errante) (1999) by Rut BLEES LUXEMBURGMonnaie de Paris
"L'installation de cette œuvre dans cette salle crée un dialogue entre la Tamise et la Seine. Rassembler ces deux fleuves est pour moi une notion très poétique, rendue possible ici."
Rut BLEES LUXEMBURG
"Ce qui m'intéresse dans les objets qui nous entourent, c'est leur origine, leur conception… Je pense qu'un objet permet de comprendre toute une évolution sociale…"
Jean-Hubert Martin interview Jean-Luc VILMOUTH, Le bruit des choses, Éd. Jacques Damase, Paris, 1986
Interaction avec marteau et clous (détail) (1980) by Jean-Luc VILMOUTHMonnaie de Paris
"C'est une œuvre réalisée selon un schéma et reproduite d'exposition en exposition. (...). [Elle est] réalisée par facettes autour d'un objet. Lorsqu'on la reproduit, [l’œuvre] appelle une interprétation."
Frédéric PAUL, Commissaire associé
12 | Prière de marcher
Allez-y, c'est autorisé... c'est même souhaité ! L'artiste invite le spectateur à prendre part et l'oblige à se situer dans son œuvre. En marchant dans cette salle, le visiteur devient témoin et sujet, et interagit directement avec l'œuvre.
"L'écriture est ma seule originalité dans le contexte de l'art. Je ne pensais pas devenir artiste, mais écrivain.(…) L'écriture est, pour moi, la chose la mieux partagée et, à la fois, l'expérience la plus singulière."
Jochen GERZ
Commissaire : Camille MORINEAU, directrice des expositions et collections à la Monnaie de Paris
Sur une idée de Bernard BLISTÈNE, directeur du Musée national d’art moderne - Centre de création industrielle
Commissaires associés : Mathilde DE CROIX, Monnaie de Paris ; Frédéric PAUL, Conservateur, Musée national d’art moderne - Centre de création industrielle
Remerciements à
Michel BLAZY, Rut BLEES LUXEMBURG, Bernard BLISTÈNE, Mathilde DE CROIX, Camille MORINEAU, ORLAN, Frédéric PAUL
qui ont commenté par leurs voix les œuvres présentées dans l'application.
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