Botafumeiro

Le célèbre botafumeiro de la cathédrale de Compostelle est un énorme encensoir à usage liturgique dont les oscillations au sein de la nef lui ont valu sa renommée au niveau mondial. Le mot galicien sous lequel on le connaît depuis le XIXe siècle signifie, littéralement, « expulseur de fumée ».

L'encens, une résine aromatique qui parfume l'air grâce à la fumée de sa combustion, est associé dans de nombreuses cultures du monde à l'adoration de divinités. Dans la liturgie chrétienne, c'est un symbole associé à un espace religieux et à la préparation des autels. De plus, c'est l'un des trois éléments offerts à l'enfant Jésus par les Rois Mages.

On ignore à quel moment un encensoir de ces caractéristiques a été fabriqué pour la première fois pour la cathédrale de Saint-Jacques même si la tradition veut que son origine remonte au Moyen Âge. On peut observer, aussi bien sur la miniature de l'inventio du Tumbo A que sur le Pórtico de la Gloria (Porche de la Gloire), l'importance des encensoirs comme symbole d'un lieu sacré.

L'ingénieux mécanisme qui sert actuellement à faire osciller l'encensoir a été conçu et exécuté par l'artiste et forgeron Juan Bautista Celma au début du XVIIe siècle, probablement pour remplacer un appareil antérieur. Il n'existe aucun témoignage décrivant le botafumeiro précédent, ni sa structure ni la forme ou la taille de l'encensoir.

Pour ce qui est de l'encensoir en lui-même, la cathédrale en possède un en laiton argenté réalisé en 1851 par l'orfèvre de Compostelle José Losada et une réplique en argent exécutée en 1971. Il mesure un mètre cinquante de haut et pèse 54 kg à vide.

Pour le faire fonctionner, il faut faire appel aux tiraboleiros, un groupe de huit hommes chargés de tirer sur la corde, de plus de 60 mètres. Ils parviennent ainsi à l'élever à plus de 20 mètres de haut et à lui faire atteindre une vitesse de près de 70 km/h. Ils s'occupent de tout le processus, du déplacement et de la garniture de l'encensoir à son freinage à l'issue de la cérémonie.

Encenser la cathédrale à l'aide de ce mécanisme est aussi dangereux qu'il en a l'air et des incidents dramatiques se sont parfois produits. En 1499, il s'est détaché de sa corde en présence de Catherine d'Aragon et a fini contre la porte de Platerías. Un autre incident similaire est survenu lors de l'année sainte de 1937, produisant un tel vacarme que les habitants ont cru qu'il s'agissait d'une bombe de la guerre civile espagnole.

Neira est également à l'origine de la diffusion d'un cliché erroné concernant cet objet : son usage pour lutter contre les mauvaises odeurs émanant des pèlerins. Cette idée, déjà évoquée dès le début du XVIIe siècle, oublie qu'il existe des méthodes plus simples pour encenser un temple que de concevoir un système mécanique aussi complexe que celui du botafumeiro.

Sa principale raison d'être réside dans son aspect spectaculaire. Il existe d'autres encensoirs de grande taille dans diverses cathédrales, dont celle de Rome. Ses dimensions, en accord avec l'importance de la tombe qu'il parfume, rappelle aux voyageurs et fidèles que nous sommes face à l'un des espaces les plus symboliques d'Europe.