Mélusine : la fée bâtisseuse

Raymondin s’empresse d’acquiescer et Mélusine dessine alors au sol le pourtour d’un fief qu’elle lui donne, c’est Lusignan.
En quelques nuits, elle élève une forteresse digne de son rang, qui reste dans la mémoire collective, comme l'un des châteaux-forts les plus grands jamais bâtis en France.

Le couple vit heureux et donne naissance à 10 fils. Chacun est doté d'un trait monstrueux, mais ils connaissent tous une grande destinée.

Geoffroy Grand'dent est leur sixième fils, il naît avec une défense de sanglier qui fait saillie hors de sa bouche. Il se distingue par sa férocité au cours des croisades. Rabelais le désigne comme ancêtre de Pantagruel.
Sa statue trône, aujourd'hui, à l'emplacement de l'ancienne forteresse.

Un samedi soir cependant, Raymondin, remonté par son frère, n'y tient plus. Il espionne son épouse et découvre sa vraie nature : celle de femme serpent.
La fée s'envole aussitôt par une fenêtre du château et disparaît à jamais de la vie de Raymondin.

Le souvenir de Mélusine reste pourtant gravé à Lusignan. Les habitants de la ville portent d'ailleurs le nom de Mélusins et Mélusines.
On retrouve l'effigie de la fée à de nombreux endroits de la ville, comme ici sur la maison du tourisme, située sur l'ancienne basse-cour de la forteresse.

La ville de Lusignan et ses pâtissiers se sont emparés de ce mythe. Très précocement, des pâtisseries moulées en forme de Mélusine, avec sa queue de serpent, ont été créées. La pâtisserie a ainsi grandement participé à véhiculer le mythe de Mélusine.

Le château fort a été détruit au XVIe siècle, en pleines guerres de Religion, sur les ordres du roi Henri III.
Seuls subsistent aujourd'hui cette poterne et les vestiges de la tour Mélusine.

Le château de Marmande est, selon la tradition, l'une des œuvres de la fée.
La légende rapporte que Mélusine, après avoir bâti la tour en une nuit, revenait chaque nuit, gravir l'une de ses 365 marches. Elle s'envolait de son sommet le 31 décembre, avant de recommencer le 1er janvier.

En réalité, la tour de guet, érigée au XIVe siècle, compte 165 marches. Avec ses 35 mètres de hauteur, elle domine un paysage situé aux confins du Poitou, de la Touraine et de l'Anjou, qui permet ainsi de guetter l'arrivée des ennemis lors des nombreux conflits émaillant le territoire.

Le château de Marmande possède également un large réseau de souterrains, qui permet aux habitants de la seigneurie de se réfugier en cas d'attaques. Leurs murs sont couverts de graffitis, tout comme ceux de la tour porte, qui sont ornés de chevaliers prêts pour les joutes.

Le château est transformé en domaine agricole au XIXe siècle.
Véronique Kleiner, propriétaire actuelle, souhaite préserver la mémoire des lieux. Elle a entrepris de nombreux travaux de restauration, avec le soutien de la Fondation du patrimoine.
La tour de Mélusine va, ainsi, recouvrer un toit.

Le château de Montreuil-Bonnin a, lui aussi, été bâti par Mélusine.
Selon la légende, la fée l'aurait fait construire en mémoire de l'un de ses fils. Elle l'aurait fait étouffer pour l'empêcher de nuire à son entourage.
Ce dernier, qui ne possédait qu'un seul œil énorme, au milieu du front, était surnommé "Monstre-en-œil", il a donné son nom au château de Montreuil-Bonnin.

Le château, fondé au XIe siècle, devient possession d'Aliénor d'Aquitaine puis de Richard Cœur de Lion. Il y installe l’un des plus importants ateliers monétaires du Moyen Âge, qui se perpétue au retour du château dans le giron de la couronne française, en 1204.

L'une des constructions les plus emblématiques de Mélusine est la tour Saint-Nicolas de La Rochelle. Elle l'aurait bâtie en une nuit, en ayant prélevé les pierres nécessaires sur un chantier de son époux.
Jusqu'au XVIIIe siècle, elle est d'ailleurs appelée Tour Mélusine par les Rochelais.