Partez à la découverte de scènes de la vie quotidienne en Bretagne au XIXe siècle. Les artistes découvrent le monde paysan qui leur semble le dernier rempart face à une industrialisation et une urbanisation galopantes. La Bretagne devient terre d’exotisme, source de pittoresque et de détails anecdotiques.
Moissonneuses (île de Bréhat, Bretagne) (1893) by Pierre DupuisMusée des Beaux-Arts de Quimper
Moissonneuses à Bréhat de Pierre Dupuis
Formidable hommage au monde rural, ce tableau important, qui participe de l’engouement que connaît la Bretagne depuis deux décennies auprès de nombreux artistes, répond parfaitement aux modèles en faveur sous la Troisième République et prend presque valeur de manifeste. Nos deux petites paysannes ne rejoignent-elles pas le chemin de l’allégorie en assumant le rôle de modernes Cérès ?
Moissonneuses (île de Bréhat, Bretagne) (1893) by Pierre DupuisMusée des Beaux-Arts de Quimper
Adoptant un cadrage photographique, le choix d’un format en lunette accentuant l’effet de zoom, Pierre Dupuis décrit, avec une sincérité dénuée de mièvrerie, deux jeunes filles de l’île de Bréhat. Ces dernières, reconnaissables à leur fameux capot, prennent la pose après une journée de moisson harassante et fixent hardiment le spectateur sans se soucier de leurs hardes.
Fascinantes de présence et d’autorité, elles dominent un vaste paysage de landes et de champs fermés par un hameau et de forts affleurements rocheux. Dupuis réussit le tour de force d’ignorer la mer dans ce paysage insulaire. La lumière, bien qu’atténuée par l’heure tardive, est traitée crûment et devient presque criarde dans la gamme des orangés qui irisent le blé mûr ou le visage de nos deux moissonneuses.
Moissonneurs en Bretagne (1849) by Adolphe LeleuxMusée des Beaux-Arts de Quimper
Moissonneurs en Bretagne d'Adolphe Leleux
Exécuté avec une précision de peinture sur porcelaine, ce petit tableau d’Adolphe Leleux présente une composition complexe, avec ses multiples groupes de paysans, son paysage à plans successifs illuminé par une lumière d’été. Les couleurs sont claires, la manière fluide, sans rapport avec les expérimentations picturales en cours à Barbizon.
La Récolte des pommes de terre (1907) by Lucien SimonMusée des Beaux-Arts de Quimper
La Récolte des pommes de terre de Lucien Simon
L'un des lieux préférés de l’artiste Lucien Simon est une petite chapelle de pèlerinage, bâtie au bord de la mer à Penmarc'h, entre le port de Saint-Guénolé et le phare d'Eckmühl. Cette chapelle, dédiée à Notre-Dame-de-la-Joie, est célèbre pour son pardon que le peintre ne manque jamais. Cette fois, il s'est intéressé à la récolte dans les champs à proximité de la chapelle. Il choisit de présenter les différentes étapes de la récolte des pommes de terre depuis l'arrachage jusqu'à l'emballage et au transport.
Décor pour la salle à manger de l'hôtel de l’Epée, par Jean-Julien Lemordant
En 1905, Jean-Julien Lemordant reçoit la commande du décor de la salle à manger de l’hôtel de l’Epée à Quimper. Le grand décor est réalisé entre 1905 et 1909 et se compose de vingt-trois panneaux d’un total de soixante mètres carrés relatant cinq grands thèmes : le vent, le pardon, le goémon et la mer, ainsi qu’un ensemble représentant le phare d’Eckmühl et la chapelle Notre-Dame-de-la-Joie. En 1975, le célèbre hôtel de l’Epée ferme ses portes. Le décor de la salle à manger est acheté aux enchères par le musée en 1976.
Ramassage du goémon (1907/1908) by Jean-Julien LemordantMusée des Beaux-Arts de Quimper
Les travaux de restructuration du musée en 1993 ont permis de reconstituer à l’identique ce décor. Lemordant y évoque de manière synthétique la vie quotidienne des Bigoudens. Son œuvre constitue un véritable hymne à ces Bretons qui résistent à la force des éléments dans une nature hostile. Le peintre, grâce à l’intensité des couleurs et au dynamisme des lignes, présente une Bretagne vivante et moderne.
Le Pâtre de Kerlaz (1852) by Evariste-Vital LuminaisMusée des Beaux-Arts de Quimper
Le pâtre de Kerlaz est un vieux paysan tenant un bâton, assis sur un rocher au bord d’un ruisseau. Il surveille son troupeau de moutons. Son chien, assis près de lui, regarde le spectateur. Le berger aux longs cheveux, coiffé d’un chapeau, porte le traditionnel « bragou-braz », une culotte courte bouffante s’arrêtant au-dessus du genou. Il est chaussé de sabots de bois.
Cette oeuvre relève du réalisme inventé par Courbet. L’artiste Evariste Luminais montre un marginal, un Breton pittoresque auquel il confère une forte présence et une grande dignité.
Retour de chasse (1861) by Evariste-Vital LuminaisMusée des Beaux-Arts de Quimper
Luminais, Retour de chasse
La représentation de ces deux braconniers est une véritable scène de genre : l’un, debout, observe, en écartant la végétation, le mouvement d’un garde-chasse ou de la maréchaussée, l’autre s’allonge sur le sol pour se dissimuler. Le fusil et le lapin suffisent à raconter l’histoire.
Mais au-delà de cette scène de genre, le peintre représente un Breton stéréotypé, remarquable par ses cheveux longs et son « bragou-braz ». Ce Breton, un peu sauvage est, dans l’esprit des Français, un chouan, ce paysan de l’Ouest de la France qui a mené la résistance à la Révolution de 1789. Beaucoup de peintures de cette époque associent avec ambiguïté la figure du Breton à celle du chouan.
Les Sabotiers (1860) by Auguste GoyMusée des Beaux-Arts de Quimper
Cette scène représente une hutte de ces sabotiers qui s’installaient durant l’été dans la forêt, à proximité des arbres, notamment des hêtres. Ils se construisaient un abri en branchages pour leurs outils mais aussi pour y vivre avec leur famille. Ce travail dans les bois a été abandonné au début du XXe siècle.
Intérieur breton (1870) by Jean-Marie VillardMusée des Beaux-Arts de Quimper
L’intérieur que nous montre Jean-Marie Villard est particulièrement modeste. Le sol est en terre battue, les vêtements de la petite fille qui joue avec le chien sont presque des haillons, la grand-mère se réchauffe auprès de la cheminée monumentale.
La partie gauche est un témoignage précieux sur la vie quotidienne en Bretagne dans les années 1870.
Intérieur breton
Un buffet, un banc-coffre et un lit sont disposés les uns contre les
autres. Les pièces de faïence proviennent des faïenceries de Quimper. Trois images
pieuses constituent la seule décoration de cet intérieur. On devine que les animaux vivent juste à côté.
Intérieur près de Pont-l'Abbé (1858) by Auguste GoyMusée des Beaux-Arts de Quimper
Sur cette étude rapidement esquissée où une jeune fille finit de se coiffer, Auguste Goy dépeint un moment d’intimité familiale dans le pays bigouden. Toute la famille se prépare à sortir, peut-être pour la messe du dimanche, plus probablement pour un événement comme un mariage ou le pardon annuel.
L'Aumône (1847) by François TalecMusée des Beaux-Arts de Quimper
Le peintre François Talec évoque une scène traditionnelle dans une ferme pauvre du quartier de Kerfeunteun à Quimper. Un mendiant est accueilli par un enfant qui vit dans un intérieur démuni, en terre battue. Présents dans toutes les occurrences de la vie quotidienne et festive des villes et des campagnes, surtout depuis la disette qui avait sévi en Bretagne vers 1845, les mendiants recevaient une aumône dans toutes les demeures.
Marchande de crêpes à Quimperlé (1866) by Jules TrayerMusée des Beaux-Arts de Quimper
Observateur attentif du quotidien, Jean-Baptiste Jules Trayer représente une scène d’intérieur plongée dans la pénombre. Les paysans attablés, assis ou affairés devant le foyer de la cheminée, sont en train de déguster les crêpes achetées à la femme debout au bout de la table à gauche. La crêpe, spécialité bretonne, de sarrasin ou de froment, est un véritable plat complet que l’on accompagne généralement de lait ribot, de gros lait ou de cidre. Il s’agit tout à la fois d’un repas familial ou d’une gourmandise que l’on peut acheter au marché.